Le monde n’a plus besoin de l’aviation ou des moteurs pour voir sa taille diminuer. Les engins à voile se chargent en effet de le re-dimensionner. L’Hydroptère passe un cap mythique et homologue un run à 51,36 nœuds (95,2 km/h) sur 500 mètres le 4 septembre dernier. Le trimaran géant Banque Populaire V traverse l’Atlantique Nord en 3 jours, 15 heures et 25 minutes avant d’avaler, dans la foulée, 908 milles en 24 heures cet été. Depuis 2005, le tour du monde se boucle en tout juste 50 jours, limite qui pourrait bien tomber encore cette année, si une bonne fenêtre se présente d’ici mi-novembre. 
S’il est vrai que l’histoire de la navigation à voile a toujours vu les temps de référence évoluer de manière époustouflante, 2009 a été particulièrement riche. Les maxis multicoques spécialement conçus pour ce genre d’exercice – dont Commodore Explorer a été un des précurseurs – repoussent les limites au fi l de leurs programmes de manière impensable jusqu’alors. Joyon et Coville conservent par ailleurs leur suprématie en solitaire sur les classiques océaniques pendant que l’Hydroptère, les kitesurfs ou des engins comme Macquarie Innovation s’acharnent sur le record de vitesse absolue avec succès.

Route classique et nouveaux parcours
Le tour du monde sans escale et l’Atlantique Nord constituent, de l’avis de la plupart des marins, les tracés les plus classiques et les plus convoités. Plusieurs skippers tentent toutefois depuis quelques années de légitimer de nouvelles routes plus atypiques, dans le but d’augmenter une offre somme toute très restreinte. Olivier de Kersauson s’était d’ailleurs fait spécialiste de ces parcours peu courus avec son Geronimo, entre 2004 et 2006. La traversée Japon – Hong-Kong, le tour de l’Australie ou encore la Transpac à l’envers entre Yokohama et San Fransisco ont fait partie de ses tentatives plus ou moins heureuses. Le Gitana team a également suivi cette lancée avec le Gitana 13. Mais cette fois, plutôt pour lui offrir une fin de carrière honorable. « La Route du thé (Hong Kong – Londres) a une parfaite légitimité pour un record à la voile, car il s’agit d’une des premières courses de bateaux de
l’histoire », rappelait cependant le skipper Lionel Lemonchois dans un de nos précédents numéros. Les voiliers de commerce se tiraient effectivement la bourre sur cet itinéraire pour arriver les premiers à Londres et vendre leur thé plus cher. On se souvient également du fameux record entre New York et San Francisco, détenu pendant plus de 130 ans par un Clipper en 76 jours, et ramené à 43 jours par Lemonchois l’an dernier, après qu’Yves Parlier et Isabelle Autissier l’aient préalablement déjà fait tomber. Dans le même esprit, les villes de New York et de Barcelone ont récemment annoncé la création d’un nouveau parcours entre les deux cités, dans le but de renforcer leurs liens culturels et sportifs. Les 60 pieds IMOCA sistership Estrella Dam et W-Hotels s’affronteront au printemps prochain afi n de réaliser un premier temps de référence. Diffi cile de dire si ces tentatives n’auront qu’une vocation médiatique et commerciale, ou si elles seront réellement convoitées par d’autres. Francis Joyon, qui n’a plus grand-chose à prouver en solitaire sur l’Atlantique ou dans le tour du monde s’attaque également à un nouveau challenge entre la France et l’Ile Maurice, qu’il devrait rejoindre au moment du bouclage. Là encore, il est diffi cile de dire si d’autres suivront, ou si cet essai ne sert qu’à combler un trou du calendrier. Il n’en reste pas moins que son record de tour du monde en 57 jours n’est pas près de tomber. Aucun prétendant ne
semble se profi ler pour cet hiver.
Vitesse absolue, la barre mythique des 50 noeuds
Franchir la barre des 50 noeuds à la voile a longtemps représenté un défi comparable à celui du mur du son pour l’aviation, même si les contraintes physiques sont fondamentalement différentes, la question de la cavitation restant le problème majeur auquel les ingénieurs ont dû répondre. Un Kitesurf a fi nalement été le premier à faire tomber le record en 2008 à Luderitz, en Namibie. Ce dernier n’a toutefois pas été homologué dans un premier temps par le World Sailing Speed Record Council, qui demandait à ce que les runs se déroulent dans plus de 50 cm d’eau. Les Kite ont finalement obtenu gain de cause, et sont restés les engins à voiles les plus rapides du monde jusqu’au 4 septembre dernier, lorsqu’Alain Thébault et son équipe se sont fait flasher à 51,36 kts en rade de Hyères. Entre temps, le voilier Macquarie Innovation – si on peut encore le nommer ainsi – de Simon McKeon a passé le cap des 50 nœuds en début d’année, avec tout juste 50,07 kts sur 500 mètres.

Le Léman comme terrain d’essai
Si le canal dédié des Saintes-Maries de la Mer est longtemps resté La Mecque des records à la voile, le Léman prend petit à petit sa place dans ce monde de la vitesse. Le Cercle de la voile de la SNG a en effet mis sur pied, en partenariat avec la banque SYZ un concours permettant aux engins du lac de s’affronter sur le kilomètre, l’heure, ou encore l’aller-retour Genève-Le Bouveret. À ce jour, les Moth à foils dominent le sujet en vitesse pure. Jean-Pierre Ziegert a posé une nouvelle limite à 24,81 kts sur un kilomètre le 14 octobre avec son Mach 2. L’arrivée d’une version lémanique de l’Hydroptère en 2010 sur ce terrain de jeu pourrait toutefois remettre cette domination en question.