Philippe Cardis

De quelle réalisation êtes-vous le plus fier à travers cette décennie de Décision 35 ?

Sur le fond, être parvenu à fédérer un groupe de propriétaires très différents les uns des autres autour d’un objectif commun représente une grande fierté. Sur la forme, avoir convaincu l’ensemble des intervenants de placer le championnat au premier plan, plutôt que le support, me parait déterminant. Je suis toujours parti du principe qu’il fallait un sponsor pour le championnat ainsi que des Grands Prix autour du Bol d’Or Mirabaud. Cette plateforme a permis à des propriétaires non milliardaires de réunir des sponsors autour de leur projet, et ainsi d’élargir le potentiel de participants de la classe. Chacun a accepté d’abandonner son ancien bateau, souvent plus grand, pour acquérir un exemplaire de la nouvelle monotypie de 35 pieds, et dès la première saison nous étions huit sur la ligne.

Quel est votre meilleur souvenir en D35 ?

Sans doute le record du Ruban Bleu en octobre 2007, que nous avons bien failli ne pas décrocher. A deux milles de l’arrivée devant la Belotte, alors que le vent n’avait pas cessé de forcer depuis le retour du Bouveret pour atteindre 30 nœuds et que nous étions bord à bord avec Smart Home sous gennaker et grand voile, le bateau a pratiquement coulé ! Finalement nous avons bouclé le tour du lac en 4h52.

Quelle a été la plus grande surprise ?

A l’origine, nous ne tablions pas sur une telle internationalisation de la série. Son succès est intervenu à un moment où plus aucune autre compétition d’envergure n’intéressait les spécialistes du multicoque, qui se sont alors naturellement tournés vers notre formule. Les D35 ont également profité de l’effet Alinghi, dont la popularité a drainé un plateau de champions exceptionnels. Naviguer « à la maison » en compagnie de ces stars de la voile venues du monde entier fut pour nous un vrai privilège.

Decision 35 catamaran Voile
© Loris Von Siebenthal
La prochaine saison se court à 12 bateaux, qui voyez-vous sur le podium ?

Sur le papier, dans le désordre, les deux équipages de jeunes sont très entraînés et devraient dominer au côté d’Alinghi, avec Ladycat en embuscade dans leur sillage.

Qu’est-ce qui va vous manquer le plus ?

La compétition contre l’élite ! J’avais beaucoup de plaisir sur l’eau mais le poids de l’organisation était devenu trop lourd à gérer parallèlement à mes obligations professionnelles.

Que pensez-vous de la venue de régatiers encore plus jeunes ?

Cela fait 20 ans que je les attends ! La scène du multicoque lémanique était dominée par les mêmes personnes depuis tout ce temps. Avec son succès international et son corolaire, le professionnalisme, le championnat avait placé la barre tellement haut qu’il était devenu très difficile pour les jeunes de le rejoindre. Je salue donc l’effort d’Alex Schneiter qui a mis sur pied une relève sérieuse avec le Team Tilt. Leur participation pourrait donner des idées à d’autres, d’autant que la flotte peut encore fonctionner 6 ou 7 saisons. Non seulement ces multicoques sont conçus pour le Léman et garantissent de pouvoir naviguer 9 fois sur 10 quelle que soit la météo, mais surtout il en existe déjà 12. Il n’est pas exclu que la formule évolue avec des propriétaires plus modestes.

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