© Loris von Siebenthal

Le World Match Racing Tour, qui parcourt le monde en huit rencontres entre mai et novembre, promet depuis son rachat début 2010 de devenir une référence en termes d’attractivité pour le public, les sponsors et les coureurs. Le championnat peine pourtant à sortir du sérail et reste l’apanage de quelques aficionados. Les organisateurs sont néanmoins confiants et assurent que le développement est en route. Quinze étapes, des nouveaux bateaux de 12 mètres et une situation de référence dans le monde du sport médiatique devraient être au menu dès l’année prochaine. La réalité actuelle apparaît pour l’heure un peu différente et aucun changement notoire n’est réellement observable, à part le déclin du nombre de sites d’accueil. La Chine et le Vietnam, pourtant annoncés en début de saison ne sont pas au calendrier, et le Danish Open, longtemps incontournable dans le circuit, n’a pas non plus été reconduit, faute de sponsor.

© Loris von Siebenthal
Lourde organisation

Cela dit, la situation du WMRT est complexe. Le championnat évolue dans un environnement très concurrentiel où chaque acteur prétend représenter une opportunité unique. L’Audi MedCup, les RC 44, les Extreme Sailing Series ou encore les AC World Series sont tous en recherche d’hôtes offrant les meilleures conditions financières possibles. Les villes et les clubs ne se pressent pourtant pas au portillon et il est fort probable que les organisateurs fassent de larges concessions lors des négociations d’accueil.

Christian Scherrer, alias « Blumi », organisateur du St. Moritz Match Race et équipier du Danois Jesper Radich, rappelle également que les hôtes du WMRT n’ont pas la tâche aisée. « Organiser une étape du Tour est excessivement difficile. Contrairement à des circuits potentiellement concurrents, comme les Extreme Sailing Series ou les RC 44, nous devons tout faire. Il faut garantir le financement mais également l’organisation complète sur l’eau. Ça implique de fournir des bateaux, d’inviter les équipages, gérer les jurys et comité de course, les médias, etc. » A contrario, les Extreme ou les RC 44 s’occupent de tout l’aspect organisationnel. Les villes ou clubs se contentent d’apporter un financement et un espace approprié.

Le St. Moritz Match Race repose, comme les autres étapes du championnat, sur l’engagement inconditionnel de quelques passionnés et le reconduire chaque année reste un challenge. La recherche de sponsors est toujours difficile, un troisième partenaire manque d’ailleurs pour compléter le budget prévisionnel de l’épreuve helvétique.

Christian Scherrer, alias « Blumi », organise le St. Moritz Match Race et navigue avec Jesper Radich sur tout le WMRT. L’équipage a terminé 3e à Marstrand et occupe la 4e place du Tour après l’étape suédoise. © Rui Valido
Difficile légitimité

L’annonce l’an passé du choix du multicoque pour l’America’s Cup n’est évidemment pas un élément qui favorise l’expansion du WMRT. Will Carson, le porte-parole du Tour, affirme bien sûr que cette décision les a mis dans une position de force, puisqu’il devenait l’unique championnat officiel de match racing en monocoque. « Nous avons dénombré 110 000 spectateurs à Marstrand », ajoute-t-il. Jim O’Toole, le CEO, confirme que l’événement va gagner en indépendance et en légitimité grâce aux choix de l’America’s Cup. Il évoque même que le champion du monde de match racing pourrait acquérir autant de prestige que le vainqueur de l’aiguière d’argent. La réalité montre plutôt le contraire, et sans remettre en question les qualités sportives des participants, la route semble encore longue pour que des Minoprio et autres Mirsky soient aussi célèbres qu’un Coutts ou un Cayard. Même si la question de la renommée, dans un sport peu connu du grand public, reste largement ouverte.

Circuit fermé
© Gilles-Martin Raget

« C’est un circuit fermé, qui ne voit presque aucun renouvellement d’année en année », explique Marc Bouet, entraîneur de l’équipe de France de match racing, rarement tendre avec le WMRT. Et d’ajouter : « Les Tour cards sont vendues aux enchères, sans aucune transparence. Le problème n’est pas de payer si le prix est le même pour tout le monde, mais ce n’est pas le cas. » Et si le quadruple sélectionné aux JO n’est pas toujours en accord avec l’organisation, il ne manque par contre pas de saluer les améliorations observées depuis cette année. « Il y a eu de réelles avancées, avec notamment les courses en streaming sur le web. C’est très positif au niveau des médias et du public. »

Les ambitions affichées du WMRT étaient de faire du match racing un sport à l’image de la Formule 1 mais les moyens n’ont pas suivi, et aucun sponsor principal n’a rejoint l’organisation depuis le départ de Swedish Match au milieu des années 2000. « Le Tour n’a pas de main partner, et c’est bien sûr un frein à son développement », conclut pour sa part Christian Scherrer. L’organisation assure que les nouvelles villes hôtes seront annoncées d’ici la fin de l’année, même si aucun calendrier n’est formellement fixé. L’édition 2012 nous montrera si cet ambitieux programme peut réellement sortir du bois  et rester une référence en match racing, face à la prestigieuse America’s Cup.