« Le niveau de l’eau ne posera certainement pas de problème lors de cette Rund Um 2012 et je pense même qu’il augmentera encore », a constaté le directeur du comité de course Hubert Henzler du Lindauer Segler Club avant le départ de la plus grande régate du lac de Constance. Au moment de faire son pronostic, il pensait plus à la fonte des neiges qu’à la pluie diluvienne qui allait s’abattre sur le plan d’eau pendant tout le week-end. Les précipitations ont non seulement rempli le lac, mais elles ont aussi entraîné l’annulation de la grande fête prévue sur les quais de Lindau. Les festivités sont littéralement tombées à l’eau !

© Caja Barz/Walter Rudin

Cette 62e édition de la Rund Um allait être une affaire humide. Les 326 bateaux sous spi envoyés par le comité de course sur l’aller-retour de 100 kilomètres entre Lindau, Romanshorn, Constance et Überlingen ont offert un spectacle impressionnant au moment de leur départ. Selon les averses, le vent soufflait tout juste avec 1 à 2 Beaufort en direction du sud-ouest ou du nord-ouest. Les navigateurs allaient vivre une longue nuit froide et bien arrosée. Seuls les bateaux les plus lents ont eu droit à une bise soutenue lors de leur arrivée à Lindau le samedi matin. A ce moment-là, les régatiers des voiliers high-tech étaient déjà dans les bras de Morphée, bien au chaud dans leur lit.

Multicoque ou monocoque ?

Avec l’annonce des petits airs attendus pour la course, les spéculations allaient bon train. Allait-on assister à une autre victoire d’un Libera sur les multicoques rapides? Quand on sait que les multis ont besoin d’un minimum de vent pour exploiter pleinement leur potentiel et compenser leur désavantage au près serré et sur les bords de vent arrière, les monocoques avaient une carte à jouer. Cependant, aux yeux de la majorité des spécialistes, une victoire d’un monocoque comme l’avait réussie le Libera hongrois Raffica en 2009 dans le calme plat semblait très improbable. La bonne douzaine de catamarans extrêmes, la plupart avec un coefficient Yardstick d’environ 55, n’allait certainement pas se laisser faire…

Le Ruban bleu reste en Suisse pour la troisième année consécutive, Stefan Stäheli et son Team Sonnenkönig ayant le mieux négocié les trous d’air. © Caja Barz/Walter Rudin

Faut-il rappeler que les multicoques ont dominé ces dernières années, même dans les conditions de vents légers ? Pour cette édition, les équipages ont mis toutes les chances de leur côté en optimisant leurs bêtes de course. Veit Hemmeter du club organisateur a ainsi pris le départ avec un Ventilo M2 encore plus rapide. Les Hongrois n’ont pas été en reste. Ils ont équipé un Ventilo M1 avec un mât plus grand et ajouté des appendices aux flotteurs. Personne, par contre, n’a fait preuve d’autant d’acharnement que Ralph Schatz pour réaliser son objectif, à savoir une victoire de la Rund Um. L’année dernière, il avait réussi à terminer son SL33 Black Jack quelques heures seulement avant la régate. A ce jour, il n’a pas encore fait ses preuves lors d’une course.

Illustres abandons

Vainqueur-surprise de 2011 sur son Holy Smoke, un catamaran vieux de 23 ans avec lequel il avait battu les Ventilo et autres bateaux high-tech, Albert Schiess était donc confronté à une concurrence de taille. A la conférence de presse, quelques heures avant le départ, il était plutôt pessimiste, considérant que son bateau de taille modeste était trop vieux, même s’il l’avait renforcé avec du carbone.

Après plus de sept heures de course, seulement une minute et 37 secondes séparent le vainqueur du deuxième. A Überlingen, Ralph Schatz avait encore mené les débats avant de se faire dépasser par Stefan Stäheli. © Caja Barz/Walter Rudin

Son abandon dû à des problèmes de mât était néanmoins une surprise. Il n’a pas été le seul à quitter la course de façon prématurée. Victorinox, le Ventilo de Dany Monnier, avait chaviré à l’entraînement avant d’être redressé par la société de sauvetage et n’était plus en mesure de se présenter au départ. Autre abandon, celui dû au démâtage du multicoque allemand Vitanas qui reste inexpliqué. « On n’a pas fait dix sorties sur l’eau avec ce mât », a précisé l’équipage qui se trouvait alors dans le groupe de tête et qui s’en est fort heureusement sorti sans égratignures.

Malgré ces illustres abandons, les prétendants au titre parmi les multicoques étaient encore assez nombreux et le vent n‘était pas assez léger pour laisser une réelle chance aux Libera.

Abonné à la victoire
Les monocoques n‘ont plus guère de chances de gagner. © Caja Barz/Walter Rudin

Le déroulement de la régate est simple. « C’était une bataille permanente pour vaincre les trous d’air, mais le vent s’est rapidement installé et nous avons décollé », raconte Stefan Stäheli, le vainqueur de cette 62e édition sur le Ventilo Sonnenkönig. Avec son équipage de la Seglervereinigung Kreuzlingen, il a ainsi remporté sa deuxième Rund Um, après sa première victoire de 2010. Et, comme il y a deux ans, il s’est imposé devant Ralph Schatz de Meeresburg qui affichait un retard d’une minute et 37 secondes seulement, après plus de sept heures de course. Il n’est donc pas prêt de perdre sa réputation d’éternel deuxième. Thomas Rüegge, lui aussi de la Seglervereinigung Kreuzlingen, complète le podium.

Sonnenkönig ne s’est pas contenté d’une victoire. L‘équipage a aussi participé avec un nouveau Farr 400 qui a remporté le Ruban bleu dans la catégorie des bateaux conventionnels. Un bilan réjouissant pour la Suisse !