Les Class C ont été les premiers multicoques à utiliser systématiquement une aile rigide, influençant largement les actuels AC.

« Ce n’est pas parce que les bateaux font moins de huit mètres qu’ils sont bon marché », précise Jérémie Lagarrigue, project manager chez Hydros et skipper lors du Championnat du monde de Class C. « Le coût des matériaux ne représente que 7 à 8 % du prix total de l’engin.» Des propos qui suffisent à expliquer que les Class C sont de véritables bombes technologiques pour lesquelles il faut débourser autour d’un million de francs suisses.

Alors que la dernière régate devait se disputer dans des airs particulièrement musclés, le Team Hydros a utilisé les grands moyens pour diminuer la surface de son aile.

Conçus il y a un demi-siècle sur la base d’une jauge hyper simple, les Class C ont toujours été à la base de nombreux développements. Ce sont par exemple les premiers à avoir intégré systématiquement une aile rigide. Le team Oracle a d’ailleurs largement exploité les acquis de ces bateaux pour développer son trimaran géant à aile rigide lors de la 33e America’s Cup. L’ensemble des acteurs de la 34e America’s Cup, qui s’est déroulée simultanément aux mondiaux de Class C, a encore suivi de très près la compétition, afin de s’assurer de ne pas passer à côté d’idées lumineuses.

Jérémie Lagarrigue et Billy Besson ont réalisé une véritable performance, même si l’objectif était de l’emporter.
La question du vol

C’est bien sûr la question de faire voler où non les bateaux qui a, pour cette édition, en premier lieu été posée par les ingénieurs. Ces derniers sont très vite arrivés à la conclusion qu’il fallait effectivement sortir du mode archimédien pour se démarquer. L’expérience de l’Hydroptère.ch a permis à l’équipe d’Hydros de profiter de nombreux acquis, même si plusieurs pistes ont été explorées, car la stabilité du vol sur d’aussi petites unités est un véritable défi. Foil en T, en V, en L, tout y est passé, sans oublier de monter les appendices sur des systèmes permettant de les régler dans trois axes. Si des solutions ont pu être trouvées, c’est plus du côté de la gestion de l’ensemble que les difficultés sont apparues. Un Class C n’est mené que par deux équipiers et les foils doivent être réglés en permanence. « On a tout le temps cherché à simplifier. Ce qui a paradoxalement rendu le tout très complexe. Mais le vol est clairement l’avenir de ces bateaux. Au portant, le gain est de 30% au niveau de la VMG. »

Franck Cammas, véritable extra-terrestre de la voile, s’est imposé sur cette régate, démontrant une nouvelle fois sa polyvalence.

Les ailes des Class C, surtout celles des deux leaders, Groupama et Hydros étaient particulièrement compliquées à concevoir. « Nous sommes partis d’une page blanche », remarque Jérémie Lagarrigue. Conique et équipée de trois volets, celle d’Hydros permettait de faire twister le bord d’attaque en fonction de la hauteur du mât. « Cet aspect fait parti des points les plus difficiles de notre projet. Nous avons travaillé sur des simulations de déformation du carbone pour arriver à des solutions. »

Mise en oeuvre de haut rang

La taille des bateaux, soit un peu moins de huit mètres, favorise bien sûr les idées les plus folles sans requérir des budgets démesurés. Cependant, cette longueur peut parfois être un handicap : « Il y a des travaux qui ressemblent à de la chirurgie, tellement on développe des petites pièces », relève encore Jérémie Lagarrigue.

Car c’est bien de la mise en œuvre dont il s’agit, au cœur de la technologie des Class C de dernière génération. Le TPT (Thin Ply Technology) une technique de construction qui permet de fabriquer des pièces particulièrement fines et légères, mais surtout étanches, a permis de réaliser les deux bateaux du team Hydros. Les ailes sont également réalisées avec ce procédé. « Décison a vraiment fait un boulot d’orfèvre. Les coques sont brutes de moule, et permettent de vraiment voir la qualité du travail qui est exceptionnel. »

Engins d’exception

« Nous sommes les premiers à avoir atteint trois fois la vitesse du vent, se réjouit finalement le project manager d’Hydros. Avec sept nœuds de vent, on évolue à vingt-deux nœuds, et avec dix nœuds, on a même navigué jusqu’à trente-et-un nœuds. Notre objectif était à 2.7. On est donc bien au-delà. » Pas étonnant, dans ces circonstances, que le projet de construire un voilier conçu pour remporter le Bol d’Or soit dans la ligne de mire du team. Les Class C n’ont pas fini d’influencer le paysage vélique, tant au niveau local qu’international.