Par une météo digne d’un pays nordique, le 8MJI Severn de Fred Meyer croise devant Glana de Jean-Claude Marchand. © Yves Ryncki

La Classique Edmond de Rothschild fut largement arrosée pour l’inauguration de sa nouvelle formule « voile et moteur ». L’événement se déroule depuis 8 ans traditionnellement en début d’été mais cette fois, pour ne pas déroger à la règle météorologique de 2013, ce fut plutôt à la fin d’un printemps tardif et les équipiers durent affronter pluie, grisaille et vents faibles, voire inexistants.

La manifestation rassemblait pour l’occasion encore plus de yachts de jauge et de tradition, soit des 8MJI, 7MJI et 6 MJI, Lacustre, des 2 et 3 tonneaux, des 30 M suédois, 5.50 m et autres Dragon. Proposée en collaboration avec la section Hélice de la SNG, la formule nouvelle consistait cette année à ajouter une dizaine de canots moteurs « Belle Epoque » aux voiliers amarrés devant le très sélect club de la Société Nautique de Genève.

Naviguer au fond de la rade de Genève, un beau geste mais à faire seulement sous certaines conditions. © Yves Ryncki

On pouvait ainsi admirer le Gilliat de l’association du Patrimoine du Léman, quatre Corsier Port, Barbu, Cabochard, Ida et Kikou. Deux magnifiques Riva complètent la collection ainsi que l’Orinoco II. Construit en 1950 par le chantier Corsier Port sur des plans Henri Dervin, il a été racheté dernièrement par quatre copains passionnés et soucieux de prolonger la vie de ce beau yacht incontournable de la digue nord du port de la SNG.

Joutes au moteur et à la voile

Le programme initialement prévu pour la partie « moteur » de l’événement ne put malheureusement pas être mené intégralement ; Dame Météo ne serait-elle pas sensible aux ronflements des cylindres d’époque ? Un concours de manoeuvres a pu cependant se dérouler dans le port et permettre aux pilotes de démontrer toute leur dextérité et leur délicatesse à la barre, même si la plupart du temps il s’agit d’un volant ! Particulièrement habile à ce jeu, l’équipage de la Police du Lac, à bord de Dyolin, a raflé dans une humeur joyeuse une bonne partie des prix distribués par la Banque privée Edmond de Rothschild.

Les 5.50m étaient cette année aussi de la fête, Bellagioia luttant avec Topas III venu tout spécialement de Thurgovie. © Yves Ryncki

Les concurrents adeptes de la propulsion vélique ont, dès le premier jour, pu entamer les joutes sur l’eau. D’entrée de jeu, deux Lacustre, Revanche de Guy Wuilleret et Rose des Vents de Jean-Raymond Wehrli, inauguraient en fanfare leur première participation en trustant les places de tête aux trois manches du jour dans la catégorie tradition. Dans un souci de simplification pour le comité d’organisation, cette catégorie comportait plusieurs yachts difficilement comparables tels le 8MJI Aurique Taifun, le 3 tonneaux Phoebus ou encore la très rapide Calliope de Jean-Philippe Mayerat qui, au final, payera malheureusement son absence lors du début du championnat. Cette première journée connut le même genre de musique dans les autres catégories avec la domination de Fred Meyer sur Catina V (8MJI), de Philippe Durr avec Astrée (6MJI). Elle fut suivie d’un jour sans vent et d’une manche non validée ! Les prévisions pour le lendemain ne suscitaient pas l’euphorie parmi les équipiers mais c’était sans compter sur les surprises du petit lac qui permirent deux nouvelles manches confirmant les classements du jeudi tout en permettant aux 5.50M de courir enfin ! Ces derniers ont en effet commencé le championnat le 2e jour seulement.

Catina V et Severn, les deux 8MJI de Fred Meyer à qui l’on doit en grande partie cet engouement pour les unités de prestige au bout du lac. © Yves Ryncki

Apéritif cocktail et dîner officiel ont clos cette journée annonciatrice d’un dimanche d’été (enfin !) consacré à la dernière manche et, morceau de choix pour tous les participants, à la grande parade dans la rade de Genève jusqu’au pont du Mont Blanc. Si la manche du jour n’a pas bouleversé les classements, à part peut-être entre Korrigan d’Yves Janet et Saga de Joelle Zumoffen, la parade, par contre, a provoqué l’émerveillement de tous les participants et des nombreux touristes présents sur les quais ou des nageurs des Bains des Pâquis.

La rénovation en vogue

La Suisse en général et la Suisse romande en particulier n’échappent pas à la tendance internationale actuelle qui consiste à restaurer de beaux yachts classiques de jauge ou d’agrément. Autour du lac, plusieurs chantiers hautement compétents se sont lancés avec succès : Philippe Durr (8 MJI et 6MJI), CNBC (Catina V, Endrick), Corsier Port (Taifun, canots moteurs) ou encore Birbaum (Saga, Don Ranuado, Janoa, le 15MSNS prix du patrimoine du Léman 2011). Autant de chantiers du haut lac qui démontrent leur savoir faire et parviennent à trouver des solutions modernes adaptées à une utilisation parfois exigeante, puisque certaines de ces unités régatent à un haut niveau. Le mât de Catina V est un bel exemple du savoir-faire du chantier CNBC et de son fondateur, Fabrice Marguerat : tout le circuit des drisses passe à l’intérieur, bien que le tube soit réalisé en spruce traditionnel ; il faut admirer de près les sorties de chacune où le cuivre se mêle au bois avec une précision d’horloger !

8MJI, 6MJI, 5.50, yachts de jauge... Les Régates Royales de... Genève ? © Yves Ryncki

Quand on sait qu’ un ou deux 8MJI attendent un coup de jeune dans des chantiers et que probablement d’autres bateaux ne demandent encore qu’à rejoindre les eaux lémaniques, on imagine avec plaisir un avenir radieux pour la Classique Edmond de Rothschild !