Le 12 juin dernier, à 19h30 précise, le coup de canon retentit dans la baie de Lindau. Il reste quasiment sans effet. Les 408 bateaux restent immobiles, certains se trouvent encore loin derrière la ligne de départ. Sur les nombreux bateaux spectateurs et le long du quai, les passionnés et les badauds se frottent les yeux, incrédules. « Ne devraient-ils pas partir maintenant ? », « Est-ce normal ? ».

En effet, les conditions de vent ont créé une situation de départ étrange lors de cette 59e édition de la Rund Um qui a eu lieu les 12 et 13 juin. Pendant la journée, un vent d’ouest a permis aux équipages de s’entraîner sous de bonnes conditions sur le lac de Constance. Une occasion que de nombreux concurrents n’ont d’ailleurs pas hésité à saisir. En fi n d’aprèsmidi, le vent a commencé à faiblir jusqu’à s’endormir complètement quelques minutes seulement avant le départ clouant la fl otte sur place. Un seul bateau passe la ligne plus ou moins à temps : le Libéra Raffica du lac Balaton en Hongrie. Son skipper Zsolt Kiraly vire en direction du vent attendu et profi te d’une légère brise peu après le départ. Il ne faut pas plus pour faire décoller son bateau extrêmement léger et surtoilé. Le Raffica prend le large et augmente rapidement son avance sur les concurrents. A ce moment de la course, tout semble indiquer que les Libéra renouent avec le succès après la modification des règles en 2007. Le Raffica est bien parti pour terminer le parcours Lindau-Romanshorn-Constance-Ueberlingen et retour en tête.

Libéra contre high-tech
En 2007, le Lindauer SC, en sa qualité de club organisateur, avait décidé d’accepter également les catamarans ainsi que les bateaux dotés d’une quille inclinable et d’un système de ballast d’eau et de les classer dans le même groupe que les Libéra. Une décision moyennement appréciée puisque la plupart des propriétaires avaient renoncé à leur participation. En revanche, elle a permis de faire évoluer la course grâce à quelques innovations. Le peloton s’est ainsi agrandi de catamarans X40, de Psaros 40, de constructions maison comme le Wilke 49 de Wolfgang Palm construit en Suisse ainsi que de Class America. Cette année encore, deux Psaros 40, le Wild Lady de Wolfang Palm, un catamaran X40 et les deux Class America stationnés à Langenargen se sont inscrits pour la course. Sans oublier le catamaran YSA barré par Eckhard Kaller terminé seulement quelques heures avant la Rund Um. Construit dans le chantier naval de Sven Ackermann à Wasserburg, ce cata conçu spécialement pour les conditions du lac de Constance mesure 12m de long, possède une voilure de 140m2 et un poids plume de 600kg. Parmi les illustres favoris, il faut encore mentionner quatre Libéra, même s’ils affichent un retard technologique incontestable sur leurs concurrents high-tech. Réussiront-ils à créer la surprise ? Oui, ils l’ont fait. Raffica, qui laisse ses adversaires loin derrière juste après le coup de canon libérateur, franchit la ligne après un peu plus de 12 heures remportant cette 59e édition de la Rund Um. Il ne mène pourtant pas la course de bout en bout. Même Ralph Schatz qui essayait pour la troisième fois de remporter cette course mythique sur un X40 loué pour l’occasion pointe en tête pendant un court moment avant de rester scotché dans un des nombreux trous d’air. Il doit finalement se contenter de la 7e place. Avec Albert Schiess du YC Arbon, le sort a été plus clément. Visiblement à l’aise, il remonte la flotte de manière spectaculaire sur le lac d’Ueberlingen grappillant place après place. Vers 5h45, son petit catamaran Holy Smoke se retrouve seul devant. La joie est toutefois de courte durée. Menant le groupe des poursuivants, Raffi ca profite d’une bande de vent pour reprendre l’avantage et laisse le peloton loin derrière. Albert Schiess passe la ligne 41 minutes après le vainqueur en 2e position. Un excellent résultat certes, mais comme la victoire était à portée de main, certainement aussi une petite déception. A la troisième place, c’est un autre Libéra qui arrive 20 minutes après le 2e. Lillo de Markus Fuchs et prouve que ces bateaux possèdent un réel potentiel dans le petit temps.

La présidente sereine
Pendant que les autres favoris ferment la boucle entre 8 et 11 heures du matin, c’est une journée chaude, mais sans vent qui attend les autres 2 000 participants. La patience est de rigueur ! Las d’une attente interminable, de nombreux concurrents jettent l’éponge et rentrent au port au moteur. D’autres ne sont plus validés en raison du dépassement du temps limite de 24 heures. Au final, 122 bateaux réussissent à terminer la course dans les temps, dont 19 le petit parcours. Christine Holz, la présidente du LSC, qui a elle-même participé sur un 8 mJI classique, ne s’en inquiète pas outre mesure : « L’année dernière, il y avait beaucoup de vent, cette année, un peu moins. Notre sport dépend de la nature, c’est un fait ». On ne peut que lui donner raison. Un peu plus de vent à l’occasion du 60e anniversaire l’année prochaine ne serait pourtant pas de refus.