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Etre un bon navigateur sur Opti n’est pas une question d’âge. Huit ans est l’âge idéal pour suivre un stage d’initiation. © Ruth Baumgartner

Il n’existe probablement aucune autre série de bateaux qui exige un tel travail pour mettre sur pied son championnat suisse. Les raisons ne sont pas uniquement liées à la participation record affichée régulièrement par les Optimist, mais résident aussi dans le fait qu’assurer la sécurité et l’encadrement sur l’eau demande un investissement conséquent. Sans compter les nombreux parents qui sont certes les bienvenus, mais créent souvent plus de problèmes que leurs filles et fils.

Cela n’a pas empêché le petit club nautique situé au bord du Sihlsee de relever le défi avec brio. Garantissant assez de vent par beau temps, le petit lac rencontre un franc succès auprès des régatiers. Avec une régularité impressionnante, un vent thermique entre deux et quatre Beaufort se lève pratiquement tous les jours vers 10 heures du matin. Des conditions appréciées également par les jeunes navigateurs sur Opti. Issus de dix pays différents, ils avaient fait le déplacement jusqu’à Bienne pour consacrer leur champion. Une magnifique région rurale, un club hôte aux petits soins et une magnifique météo estivale ont contribué à faire du championnat suisse des Opti un événement réussi sous tous les angles.

La Suisse aux avant-postes

Depuis 2009, plus aucun Suisse n’avait réussi à remporter le titre de ce championnat suisse international, donc ouvert aux navigateurs venus de l’étranger. Allait-on pouvoir inverser la tendance ? Les signes étaient pour le moins encourageants : aux championnats d’Europe et du monde en juillet dernier, l’équipage suisse avait obtenu d’excellents résultats. Et aux mondiaux qui se sont déroulés en République Dominicaine, tous les Helvètes se sont hissés dans la première moitié du tableau. En plus, 8e dans le classement des nations était le meilleur résultat jamais réalisé. Pour apprécier ce succès à sa juste valeur, il faut mentionner que la Suisse a battu plusieurs grandes nations de voile comme la France ou l’Italie !

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Alberto Casco, le président de Swiss Optimist, a une explication logique à ces exploits : « Nous disposons d’un nouveau staff d’entraîneurs pour les navigateurs et navigatrices sur Optimist. Antonis Drosopoulos est connu dans son pays d’origine, la Grèce, comme faiseur de champions. Ses protégés ont déjà remporté 25 médailles. Et notre entraîneur Zizi Staniul s’est rendu immédiatement après les mondiaux à Londres où il a décroché deux médailles dans sa fonction de coach de l’équipe polonaise. »

Domination de Suri
Peter Gebisdorf, entraîneur légendaire du lac de Bienne, et président d’honneur de Swiss Optimist, a découvert le talent de Damian Suri et a décidé de le promouvoir. © Ruth Baumgartner

D’entrée, les meilleurs Suisses sur Optimist ont montré à leurs concurrents étrangers ce qu’ils ont appris chez les nouveaux entraîneurs en trustant les trois places du podium. Bien que les représentants des autres nations aient réussi à réduire leurs écarts dans les jours suivants, ils n’ont pas pu combler leur retard sur Damian Suri qui est resté maître de la situation. Avec une régularité admirable, le Biennois a merveilleusement bien géré les conditions de vent difficiles – la bise ayant perturbé le vent thermique habituel créant d’importantes bascules de vent – pour gagner cinq manches et s’imposer au général avec neuf points d’avance sur le deuxième.

Damian a commencé la voile à l’âge de 10 ans, ce qui est relativement tard. Il s’est rapidement illustré en se classant régulièrement dans les premiers. Ses incroyables progrès, il les explique par son entraînement chez DIRT, le groupe d‘entraînement interrégional de Suisse alémanique. « Nous avons commencé à nous entraîner en hiver en Grèce et puisque seulement les meilleurs des clubs peuvent y participer, nous nous poussons mutuellement pour atteindre nos meilleures performances. »

Alberto Casco et Hene Keller ont toutes les raisons d’être heureux : Le groupe d’entraînement DIRT est un succès incontestable. © Ruth Baumgartner

Questionné sur les raisons de son initiative, Hene Keller du Regattaverein Oberhofen qui a lancé DIRT il y a trois ans avec Alberto Casco, explique : « Dans les régions alémaniques, il n’y avait pas assez de navigatrices et navigateurs ambitieux. Faute d’une promotion professionnelle, ils n’étaient que très peu d’enfants à avoir accès au groupe national d’entraînement. Aujourd’hui, les meilleurs navigateurs sur Opti des régions alémaniques sont regroupés chez DIRT et préparés de manière ciblée aux régates de sélection de Swiss Optimist. »

Les Romands battus

Le succès ne s’est pas fait attendre. Le nouveau champion suisse n’est pas le seul à être issu de DIRT, sept des onze autres navigateurs sélectionnés pour les championnats internationaux ont également bénéficié de cette plate-forme de promotion interrégionale. Un mérite que Julie Baudet, la vice-présidente de Swiss
Optimist, originaire de la région lémanique, reconnaît volontiers : « S’il existe une structure similaire à la promotion des jeunes chez nous, les navigateurs qui se rendent aux entraînements en hiver sont rares. Peut-être que c’est une question de mentalité. En Romandie, les jeunes préfèrent aller skier. Ces résultats devraient pourtant nous réveiller. »

Connu comme promoteur déterminé qui sait habillement tirer les ficelles, Alberto Casco qui œuvre aussi comme président de Swiss Optimist, n’aimerait pourtant pas que les deux régions linguistiques fassent bande à part. Sa vision est toute autre : « Finalement, nous avons tous un SUI dans la voile et on devrait conjuguer nos efforts pour améliorer nos performances », confie-t-il en souriant. Et d’ajouter : « Avec nos deux nouveaux entraîneurs dans le Talentpool de Suisse, l’anglais s’est imposé et il n’existe plus de problème de compréhension. Peut-être qu’à l’avenir, DIRT et l’ACVL s’associeront pour viser un objectif commun. »