Le CER avait annoncé la couleur en démarrant sa deuxième saison en D35: « Nous participons pour gagner ». © Loris von Siebenthal

Leader du Vulcain Trophy, vainqueur du Bol d’Or Mirabaud (voir Skippers n° 44), premier du classement amateur du Tour de France à la Voile, Champion Suisse de Match Racing (lire en page 58), sélectionné au Trophée Clairefontaine, le CER réussit à peu près tout ce qu’il touche depuis le début 2012. Cette bande de jeunes que plus personne n’ose appeler les Punks interpelle encore et toujours au fil des régates. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur le secret de ce remarquable succès.

Créé il y a plus de 30 ans par une poignée de passionnés de voile, dont un ancien de Fehlmann, Roderick Van Schreven, l’organisme bénéficie d’une aide financière de la Ville de Genève depuis le début de son existence. La devise des politiciens qui le soutiennent a toujours été de favoriser la pratique de la régate pour tous, quel que soit le budget de chacun (la cotisation annuelle est de CHF 150.-). Tous ceux qui ont mené l’organisation se sont efforcés de trouver le subtil équilibre entre les résultats sportifs et l’ouverture à la relève pour continuer de correspondre aux statuts fondateurs.

Premier amateur, et 5e au général : une performance remarquable pour une première en M34. © Jean-Marie Liot
Un consensus politique

Roger Dafflon, André Hediger, Manuel Tornar et depuis l’été 2011 Sami Kanaan, ont successivement été les responsables politiques du CER. « Le sport a cet avantage de ne pas être polarisé, explique le Conseiller Administratif en charge de la Culture et des Sports, Sami Kanaan. Toutes les formations politiques sont généralement acquises à sa cause. Il n’y a donc pas de remise en question de notre soutien aux associations. » Le responsable exécutif se réjouit par ailleurs des récents succès de Jérôme Clerc et son équipe. « On accepte tous les résultats. Ce n’est jamais un but en soi, mais ce qu’ils font démontre que le travail paie, et nous nous en félicitons. Le Tour de France à la Voile est devenu très compétitif. Pouvoir y briller suscite des vocations et c’est un peu notre but. Mais la démarche reste complètement amateur et nous y tenons. » En accord avec ce qu’ont pu faire ses prédécesseurs, le Socialiste se réjouit de voir que le Léman continue d’être une pépinière de talents.

Succès cycliques

Côté présidence, on tient un discours pragmatique : « Si le CER réalise des résultats aussi remarquables, c’est parce qu’on peut donner les moyens à des jeunes d’exprimer leur talent, relève Jean-Claude Burdet, Président du comité depuis une dizaine d’années. Il y a une sorte de cycle au niveau des dynamiques, et nous sommes en ce moment au sommet de l’un d’eux. Il y a eu Etienne David et Jean-Marc
Monnard au début des années 2000. Ils ont construit une équipe extraordinaire qui a réussi à faire un podium sur le Tour de France, et remporter le Championnat des D35. Ensuite, c’est Julien di Biase et Denis Girardet qui ont pris la relève pour remonter un noyau dur. Aujourd’hui, Jérôme Clerc et Elodie-Jane Mettraux constituent ce socle. » Actif de longue date dans la formation des jeunes et également régatier chevronné, Jean-Claude Burdet est ravi des récents résultats obtenus, mais considère qu’un retour vers un fonctionnement plus en phase avec la formation de la base doit être opéré. « L’équipe actuelle est extrêmement performante, et c’est une réussite. Maintenant, il y a un risque qu’elle se resserre trop sur elle-même et que les nouveaux venus ne trouvent pas leur place. La situation est donc saine, mais il est important de rester vigilant pour conserver l’équilibre. Les Surprise n’ont par exemple pas brillé comme ils l’ont fait à d’autres occasions et ça peut être une préoccupation. Le Léman doit rester le terrain de jeu privilégié du CER, et le Tour de France son Graal. »

Les podiums, un territoire devenu habituel pour les membres du CER. © Jean-Marie Liot
© Jean-Marie Liot
Choix techniques judicieux

Jérôme Clerc, administrateur depuis 2008, rejoint cette vision. « Il est clair qu’on a touché la limite de l’association. Nous avons atteint les objectifs que nous nous étions fixés. C’est le côté gratifiant. Après, si on veut aller plus haut, on n’est plus compatible avec les fondements. » Skipper du M34 avec Elodie-Jane Mettraux, et également skipper du D35 Realstone Sailing, Jérôme Clerc voit la clé des résultats 2012 dans une préparation minutieuse. « La qualité de l’équipe est clairement la base de notre réussite. Mais nous avons également fait les bons choix cet hiver. Nous nous sommes concentrés sur la vitesse, qui est un meilleur facteur de réussite que les manoeuvres. Quand on va vite, on est plus intelligent, et ça a fonctionné. Cette démarche a été appliquée autant sur le D35 que sur le M34. »

La tournure que le CER va prendre en 2013 n’est pas encore connue, et ni le président ni l’administrateur ne s’aventurent à dévoiler les projets en cours. Ce qui semble acquis, c’est qu’une petite réforme visant à reconquérir une relève soit en cours, et que le projet lié au D35 devienne indépendant de l’association. Le CER aborde donc un nouveau cycle, qui ne devrait pas manquer de faire naître de nouveaux talents, comme il l’a toujours fait depuis plus de 30 ans.