Big Ben a explosé. Le désormais quintuple médaillé olympique s’est sublimé à Weymouth. Malgré les tentatives du Danois Hogh-Christensen pour détrôner le maître, le grand Ben s’est surpassé pour finalement s’imposer à égalité de points lors d’une Medal Race d’anthologie.

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Cet exploit fait rêver, particulièrement quand on sait combien il est difficile de se relever d’un mauvais pas. Mais Ainslie est au-dessus du lot, et son accès pour la quatrième fois au titre suprême représente un véritable tour de force, qu’aucun autre régatier ne saurait reproduire dans les mêmes circonstances.

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L’Australie ressort également grand vainqueur de ces Jeux. Le pays down under ramène en effet trois médailles d’or, en 470, en 49er et en Laser. Le reste des premières places est réparti entre l’Espagne, la Chine, la Suède, la Nouvelle Zélande et les Pays-Bas. Les Français, qui avaient pourtant brillé en phase pré-olympique, terminent avec seulement le bronze en Finn.

 

Déception suisse
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Côté suisse, la délégation a abordé ces olympiades avec de sérieux espoirs de diplômes et de médailles. Mais les objectifs n’ont clairement pas été atteints. Flavio Marazzi et Enrico De Maria terminent 13e. Nathalie Brugger ressort 14e. Richard Stauffacher, le seul a avoir eu accès à la Medal Race, prend la 10e place, alors que la paire Brauchli Hausser revient avec une assez belle 16e place, dans la mesure où l’équipage participait à ses premiers Jeux. La plus grande déception de la délégation est évidemment celle des staristes, qui visaient clairement un podium. Tout le monde attendait une progression par rapport à Pékin. L’inverse s’est malheureusement produit.

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Le lot de consolation des régatiers suisses est qu’ils n’ont pas fait moins bien que leurs compatriotes des autres disciplines. À part quelques bonnes surprises, les athlètes suisses sont pour la plupart revenus déçus de leurs résultats. « Aucun athlète dont le potentiel lui permettait de rêver d’un podium n’a signé d’exploit, a d’ailleurs regretté le chef de mission de Swiss Olympic Gian Gilli. Nous n’avons pas suffisamment de diplômes par rapport à Pékin. Moins de 50 sportifs sur les 102 sélectionnés ont su exploiter au maximum leur potentiel le jour J. C’est insuffisant. »

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Les commentaires sur ce que certains qualifient d’échec ont fusé, tant sur la toile que dans les médias. « Le sport suisse n’est pas soutenu, il est en retard, il n’est pas valorisé, a déclaré à juste titre le chef des sports de la RTS, Massimo Lorenzi. Tous les quatre ans on prend une claque. » Les fédérations et politiques en prennent pour leur compte, mais il semble peu probable que les choses changent à court terme. Le sport suisse repose essentiellement sur des projets personnels qui deviennent de plus en plus incompatibles avec les exigences de l’élite. Il s’agit d’une réalité qui n’est pas prête de changer.

Richard Stauffacher est le seul athlète suisse à avoir eu accès à la Medal Race. © Jurg Kaufmann
Ce que pense la Fédération

Swiss Sailing et Swiss Sailing Team, l’organisme responsable de la formation de l’élite se sont bien remis en question, et ont choisi de rester sur une note positive. Tom Reulein, le chef de la délégation suisse à Weymouth, estime que « la planche à voile et le 470 ont atteint, ou frôlé leurs objectifs personnels, tandis que le Star et le Laser Radial n’y sont pas parvenus. Nous avons pu constater que la voile olympique s’est encore développée, tant du point de vue technologique qu’au niveau de la méthodologie d’entraînement ».

Nathalie Brugger, 14e, espérait faire mieux que sa 6e place à Pékin. © Jurg Kaufmann
Le Duo Marazzi/De Maria a vécu une semaine noire et termine ces Jeux à la 13e place. © Jurg Kaufmann

Pour Vincent Hagin, « le bilan est mitigé. Mais il y a eu de belles choses, qui sont de bon augure ». Le président de la Fédération suisse de Voile rappelle que les Anglais, qui jouaient pourtant dans leur jardin n’ont pas fait une moisson si exceptionnelle que ça, en dehors de l’or d’Ainslie. « L’olympisme est vraiment différent du reste. Flavio Marazzi et Enrico De Maria ont vécu une semaine noire. Leur projet était pourtant un des plus aboutis pour arriver à la médaille. Le potentiel était réel. Après, ça n’a pas fonctionné au bon moment. » (lire son édito dans les pages Swiss Sailing)

Le duo Brauchli/Hausser représente la révélation suisse de ces Olympiades. Sélectionnés in extremis, les deux régatiers ont acquis une expérience importante pour la suite de leur carrière. © Jurg Kaufmann

La question de la vraie reconnaissance du sport en Suisse est bien sûr relevée ainsi que le problème de l’incompatibilité entre les études supérieures et une carrière en élite. « Je pense qu’il faut une structure qui permette de faire du sport de haut niveau et des études jusqu’au bac. Au-delà, les athlètes doivent faire des choix. Un engagement sportif à 100 % est indispensable, quitte à revenir vers des études après. » Cette position rappelle encore le manque de moyens disponibles, pour offrir un réel cadre professionnel aux prétendants.

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L’avenir nous dira si les instances suisses du sport sont capables de tirer des enseignements de ces olympiades. Les jeux restent quoi qu’il en soit le rêve de nombreux athlètes, et plusieurs ont déjà déclaré leur intérêt pour poursuivre en vue de Rio 2016. Nathalie Brugger et Jean-Pierre Ziegert tenteront l’aventure en Nacra 17 (lire page 104). La paire Brauchli Hauser va bien-sûr continuer. Leur qualification pour Londres visait avant tout à acquérir de l’expérience pour la suite. Guillaume Girod, qui n’avait pas réussi à se qualifier à Londres, compte également monter un projet.

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