Alors que le planchiste Richard Stauffacher et l’équipage du 470 masculin, Brauchli/Hausser, ont atteint les buts qu‘ils s‘étaient fixés, nos deux équipages fer de lance de l’équipe nationale, Marazzi/De Maria et Nathalie Brugger, ont vécu une semaine difficile. Et ce, malgré le fait que la Fédération a tout mis en œuvre pour leur succès. Bien que les projets aient été professionnels, voire exceptionnels pour ce qui est du Team Marazzi, les choses ne se sont pas déroulées comme prévu. Même constat pour le reste de l’équipe olympique où, selon le chef de mission, 50% des athlètes n’ont pas réussi à atteindre leur meilleure performance. D‘autre part, certaines fédérations font à chaque JO des médailles ou des places d’honneur. Il est donc légitime de se poser la question suivante : pourquoi les athlètes de Swiss Sailing n’arrivent-ils pas à remporter une médaille olympique ? La réponse je ne l’ai pas. Mais j’ai quelques pistes de réflexion et ce premier édito post-olympique est propice à cela.

Un des points importants à évoquer est que ceci n’est pas propre à Swiss Sailing. La question porte sur les moyens mis à disposition dans le sport de très haut niveau. Même si la Swiss Sailing Team a bénéficié de moyens plus élevés ces deux dernières années, ils restent instables sur le long terme. Et puis, c’est l’approche même du sport de haut niveau dans certaines fédérations suisses qui n’est pas encore à la hauteur. A l’heure actuelle, si un athlète veut gagner des médailles, il doit se concentrer à 100% durant 12 à 15 ans, et ceci au plus tard dès l’âge de 15 ans, sur le sport. Ce n’est pas le cas chez Swiss Sailing. Malgré cela, il faut mettre au crédit des athlètes qui ont le mieux intégré la « philosophie » Swiss Sailing Team une réussite vis-à-vis des objectifs fixés. Et je félicite les athlètes pour ce changement de mentalité.

Avec le temps, j’ai acquis deux certitudes. La première est que la création de Swiss Sailing Team a permis un développement dans la bonne direction, ce qui permet d‘offrir des moyens professionnels aux athlètes qui s’engagent pour un projet olympique. La seconde peut surprendre : je ne suis pas pour la combinaison d’études universitaires et d’une carrière sportive de haut niveau. D’après moi, il va falloir que nos athlètes fassent un choix durant une partie de leur vie. Quitte à ce qu‘ils stoppent leur carrière sportive vers 24-25 ans si la réussite n‘est pas au rendez-vous pour leur permettre une reconversion. Alors, que faire ?

En plus d’offrir des moyens professionnels, il faut à mon avis professionnaliser les athlètes. Ce qui devrait engendrer un changement fondamental, celui d’accepter la perceptive de faire uniquement une carrière sportive. La démonstration est simple: connaissez-vous des banquiers, carrossiers qui, en plus de leur profession, pratiquent une autre carrière professionnelle ? La réponse est non !

Alors pourquoi nos athlètes n’acceptent-ils pas la perspective de devenir des sportifs professionnels ? C’est probablement dû aux perspectives, comme je l’entend régulièrement. Ce n’est pas tout à fait faux mais, à quelques rares exceptions près, cette idée empêche tout engagement total et, de ce fait, la réussite à très haut niveau. Mais je suis optimiste et je pense que les plus courageux, tout en acceptant de vivre avec des moyens réduits, pourraient se consacrer à 100% à la voile. Et s’ils possèdent assez de capacités, peut-être gagneront-ils une médaille olympique.

Finalement, ce carré noir avec un unique pixel comme point lumineux à la place de ma photo est le symbole représentant le tunnel dans lequel nous sommes ainsi que la solitude dans laquelle se trouvent les athlètes, lorsqu’ils doivent décider de se lancer dans cette carrière. Mais comment sortir de ce tunnel ? On peut soit revoir les objectifs à la baisse, soit prendre le parti de développer notre système selon ce qui a été esquissé plus haut. La forme finale pourrait être la mise en place d’infrastructures permettant d’obtenir une formation minimale pour la reconversion professionnelle. Il faudrait permettre de naviguer professionnellement, inclure le travail intensif sur le long terme, sans coupure, paramètre déterminant pour arriver à l’excellence.

Vincent Hagin

Président de Swiss Sailing