Si beaucoup de navigateurs rêvent de larguer les amarres pour une année sabbatique, ils sont finalement peu à réaliser leur souhait. Hervé Favre, Muriel et leurs enfants Robin et Julie, font aujourd’hui partie des rares familles à avoir fait le grand saut. Ils se sont lancés l’automne dernier dans l’aventure. Régatiers dans l’âme, les Favre attachent une importance particulière au support d’un voyage au long cours. Une caravane flottante n’était pas envisageable. Il souhaitaient un bateau à la fois confortable et adapté à des enfants, mais également léger, véloce et agréable à barrer. Si le catamaran s’est très vite profilé comme le plus approprié, il fallait encore savoir lequel, le marché conventionnel n’offrant pas beaucoup de choix intéressants.

La recherche du mouton à cinq pattes
Après moult locations et essais tous azimuts, Hervé et Muriel dénichent finalement le mouton à cinq pattes en Australie. Accompagnée de Jean-Michel Linck, constructeur de La Rochelle, la famille se rend sur place, où une cinquantaine d’unités du Fusion 40 navigue. Le coup de cœur est immédiat, le bateau correspond exactement aux envies et au programme. Hervé s’associe alors avec Jean-Michel et crée le chantier Fusion France convaincu de l’énorme potentiel de ce 40 pieds d’à peine plus de quatre tonnes. Le gros œuvre est réalisé en infusion vynilester en Asie, et prévu pour être envoyé en kit dans deux containers. Fusion France se charge de l’assemblage ainsi que des finitions au gré du preneur. Le premier exemplaire est bien entendu commandé par Hervé. Le défi est de taille et les difficultés sont nombreuses. Le planning est rapidement dépassé, mais les Favre ne sont pas du genre à baisser les bras. De toute façon, le départ est organisé pour l’automne 2008 et il n’est pas question de revenir en arrière. Les enfants sont sortis de l’école, la maison est louée, le job lâché. Il faut en plus assurer la promotion du bateau, d’autres modèles doivent suivre pour que le chantier puisse vivre. Les heures supplémentaires s’accumulent rapidement, le voilier doit être à l’eau pour le Grand Pavois.

Une sortie remarquée
Le Fusion 40 intrigue dès sa présentation, les journalistes se bousculent pour participer aux premiers essais. Tous saluent les qualités du nouveau venu. Le voilier est toutefois loin d’être terminé, et les nuits de travail succèdent aux journées sur l’eau. L’avancée de la saison force un peu les derniers détails et les Favre quittent La Rochelle fin octobre pour une première étape à travers le golfe de Gascogne. Les conditions sont bonnes, il faut en profiter. Ce premier test se déroule sans encombre et Kangaroo rejoint Madère en sept jours. La petite famille s’amarine, prend ses marques et son rythme. Le voyage se poursuit vers les Canaries, puis vers le Cap-Vert, première vraie escale vraiment dépaysante. La traversée prévue initialement vers la Guyane se termine en Martinique, après 13 jours et une panne de moteur n’incitant pas à se rendre dans un pays peu achalandé en pièces détachées.
Partis dans la précipitation, les Favre sont aujourd’hui aux Antilles ravis de cette première traversée, qui représentait à la fois un rêve et un challenge. «Tout s’est vraiment très bien passé, nous ne nous sommes jamais ennuyés» raconte Hervé par téléphone. Et d’ajouter : «Le bateau donne pleine satisfaction, et à part les petits ennuis qui sont le quotidien du navigateur au long cours, l’ensemble de nos choix se révèle excellent». Hervé confie encore avant de raccrocher : «Une année c’est trop court, nous envisageons déjà prolonger notre voyage». Le tour de l’Atlantique pourrait bien se transformer en tour du monde, voyage à suivre !