Des Punks en D35

Parfois surnommés les « Punks » les jeunes équipages présents sur le Circuit D35 se sont illustrés à plusieurs reprises, comme le CER lors du Bol d’Or Mirabaud 2012. © Loris von Siebenthal

Conçue par et pour des propriétaires, la classe des Décision 35 a toujours accueilli en parallèle des équipages de jeunes en son sein. L’engagement de plusieurs armateurs motivés a été la clé de cette ouverture. De nombreux talents sont passés par cette case à un moment ou l’autre de leur carrière, un chemin qui a ouvert la voie du professionnalisme à certains.

Démarrage en force

Etienne David, skipper du Zebra7 en 2004, se souvient bien de cette première saison qu’il avait dominée assez largement avec son équipage issu du CER (Centre d’Entraînement à la Régate). « La situation était un peu semblable à celle de Realteam cette année » évoque l’ancien responsable de l’Association Genevoise. Et de poursuivre : « Nous avions mené un équipage sur le podium du Tour de France à la Voile en 2003. Le comité nous avait alors soutenus dans ce projet, mais la condition était de revenir à une approche amateur l’année suivante, ce qu’a fait Julien di Biase, qui m’a succédé. Du coup, je me suis retrouvé avec plusieurs équipiers à la recherche d’un défi à la hauteur des compétences que nous avions développées durant quatre ans en Mumm 30. C’est à ce moment que Fred Amar s’est lancé dans l’aventure du D35 et a acquis deux bateaux. J’en skippais un, et l’autre était mené par Loïck Peyron. Nous avons débuté les entraînements durant l’hiver, sur l’ancien Happycalopse, afin d’être prêts dès la livraison des voiliers. Plusieurs personnes ont pensé que nous n’avions aucune chance, car nous ne connaissions pas le multicoque. De notre côté, on a pris ce support comme n’importe quel autre. On a travaillé avec la méthode mise en place en Mumm, et ça a largement compensé notre relative méconnaissance du multi. On a certes dû apprendre deux trois trucs, mais globalement, c’était des bateaux de régates, rien de plus. Par la suite, des propriétaires ont d’ailleurs bien compris que la manière comptait plus que l’expérience. Et plusieurs ont changé leur approche l’année suivante. »

Axiom, mené par Loïc Forestier, a longtemps représenté la jeune génération du circuit, avec un équipage contrastant avec ceux de la flotte. © Loris von Siebenthal
Les années Forestier

Fred Amar s’est ensuite retiré de la classe, et Guy de Picciotto a repris un des voiliers dont s’est d’abord occupé Yvan Ravussin, puis le jeune Loïc Forestier dès 2007. « Je sortais du 420 et de quelques années en Surprise, c’était une superbe opportunité » confie l’intéressé. « Loïc Preitner était à mes côtés. Une association présidée par Thierry Meyer s’occupait de manager le projet, et on menait la barque sur l’eau. Le cahier des charges était d’ouvrir le Décision 35 aux jeunes. Nils Palmieri, Nicolas Groux, Yannick Preitner, Thierry Wasem ou encore Bryan Mettraux ont notamment pu en profiter. C’était vraiment fantastique de faire partie de ce circuit. On n’avait pas beaucoup de moyens, mais on a fait quelques jolis résultats. » Zebra 7 s’est en effet illustré lors du Bol d’Or Mirabaud 2008, avec Franck Cammas à la barre. « Là encore, naviguer avec un régatier de la pointure de Cammas était une chance. Remporter le Bol avec lui, c’était un must » se souvient encore Loïc Forestier. Questionné sur l’accueil reçu par le reste de la classe, le jeune skipper ne relève aucun souvenir négatif : « Bien sûr, on se prenait peut-être un peu moins au sérieux que d’autres, et ça n’a peut-être parfois pas été bien perçu. Mais c’était marginal, et franchement, on faisait partie de la classe comme les autres équipages. » Certains ont surnommé l’équipage de « Punk », mais le quolibet est resté plus bienveillant que péjoratif, pour qualifier un team atypique.

Toujours plus jeunes, les juniors du circuit étaient âgés de 19 à 23 ANS et représentaient la Suisse lors de la Youth America’s Cup  sur Team Tilt. © Loris von Siebenthal
Le CER en D35

En 2010, quelques navigations avec Jérôme Clerc, élu deux ans plus tôt à la tête du CER, font germer une idée au sein de l’Association Genevoise. La participation au Tour de France à la Voile était en mode veille pour cause de changement de bateau, et une alternative devait être proposée. L’engagement dans le championnat de Décision 35 est venu sur le tapis, et si l’idée n’a pas été simple à faire passer auprès du comité, celui-ci fini par accepter, persuadé que la formation pouvait passer par un tel support, aussi élitiste soit-il. L’équipage s’est classé à une très honorable 5e place pour sa première participation, avant de dominer le circuit l’année suivante.

Franck Cammas special guest et Guy de Picciotto toujours attentifs aux jeunes. © Brice Lechevalier

Jérôme Clerc a toujours expliqué que la clé des résultats de 2012 résidait dans une préparation minutieuse. « La qualité de l’équipe a clairement été la base de notre réussite, mais nous avons également fait les bons choix pendant l’hiver. Nous nous sommes concentrés sur la vitesse, qui est un meilleur facteur de réussite que les manœuvres. Quand on va vite, on est plus intelligent, et ça a fonctionné. Cette démarche a d’ailleurs été appliquée autant sur le D35 que sur le M34. »

À nouveau présent cette année, mais en configuration professionnelle sur Realteam, Jérôme Clerc et son équipage sont désormais des adversaires à battre, et le chemin parcouru depuis l’arrivée sur le circuit est plus que conséquent.

Zebra 7, propriété de Fred Amar et vainqueur de la première saison, était mené par un équipage dirigé par Etienne David, et essentiellement issu du CER. © Brice Lechevalier

L’histoire des d’jeuns et du Décision 35 est forte de nombreux succès et devrait continuer. Reste à espérer que d’autres projets du même acabit suivent l’exemple et se profilent les années à venir.

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