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Tacticiens et régleurs à la manœuvre

par Quentin Mayerat

 

Le troisième jour de course de la Gazprom International Dragon Gold Cup s’est déroulé sous un soleil de plomb, dans de tout petits airs. Un bonheur pour les vacanciers douarnenistes, un flot de doutes et de questions pour les tacticiens des Dragon. A bord des 77 bateaux engagés, l’organisation et la hiérarchie peuvent varier, l’essentiel étant de bien communiquer et de déterminer qui aura le dernier mot… Dans un vent capricieux qui mettait à l’épreuve les nerfs des concurrents, c’est Vassilliy Senatorov (RUS 34), disqualifié hier, qui a remporté la course du jour. A mi-parcours de la ‘Gold Cup’, le suspense reste entier…
Une course de régleurs ou de tacticien ?

Stéphane Baseden (FRA 402) semblait partagé alors qu’il larguait les amarres pour rejoindre le plan d’eau. «Ce sera un régate pour les régleurs ou les tacticiens, sûrement, mais certainement pas pour les barreurs». Sur le bateau Italien de Gianni Ezio Murzi (ITA 62), les avis divergeaient. Les deux Tanguy (Mahé et Ravach), équipiers du bord, allaient devoir se mettre d’accord, l’un considérant que la tactique serait prépondérante et l’autre, les réglages, «à optimiser dans les petits airs». Pour autant, ils étaient à l’unissons sur une chose : «ça va être passionnant ». A bord de ‘Pas de Cartier’ (FRA 380), Vincent Jeantet nous expliquait qu’il était convaincu d’une chose : «Revenir rouge comme un homard, à défaut d’en pêcher. A Douarnenez, ce sont toujours des courses de tout et de tous ».

Sur certains Dragon, ils sont tous un peu ou beaucoup tacticiens et sur d’autres, le tacticien est désigné et c’est l’homme qui a le dernier mot. Quand ils le sont tous, comme sur le Dragon des frères et fils Guillou (FRA 296), «il y a des conciliabules à chaque virement de bord, mais le groupe reste souriant et soudé », s’amuse Joseph. Cette ambiance bon enfant n’est pas le lot de tous les concurrents. Pour les ténors de la série, la Gazprom International Dragon Gold Cup est une épreuve prestigieuse et l’enjeu est de taille. Ainsi, Laurie Smith (GBR 785), qui est le barreur de son Dragon en est aussi le ‘boss’. «Sur d’autres bateaux le barreur …barre et le tacticien donne les informations qu’il faut suivre. Cela marche différemment sur notre bateau, nous discutons du vent et des options, et je prends la décision finale, même si je suis le barreur ». Même son de cloches du côté de Luc Pillot : «Nous tactiquons tous, mais c’est moi qui tranche », alors qu’à bord du Dragon (RUS 76) de Dimitri Samokhin les rôles de chacun sont très déterminés : «Sur le bateau c’est le tacticien qui lit le plan d’eau et qui nous dit où nous devons aller. Mon rôle en tant que barreur c’est de faire en sorte que le bateau avance, et de le relancer. Je reste concentré là dessus ».

Sur le bateau vainqueur du jour (RUS 34), c’est Igor Ivahintsov le tacticien. Vassilliy Senatorov explique que ses deux équipiers communiquent beaucoup et que c’est Igor qui prend les décisions. Pour sa part, Vassilliy confie être très concentré à la barre et ne pas ou peu intervenir.

Un navigateur tacticien…

Jean-Luc Nélias est considéré comme l’un des meilleurs navigateurs français. A Douarnenez le voici propulsé tacticien. «L’essentiel c’est d’aller vite au bon endroit. Les navigateurs interviennent sur les courses au large, pas sur des régates en baie. Ils échangent avec le tacticien du bord et leur boulot c’est aussi de gérer les combinaisons de voiles, ce qui n’est pas le cas en Dragon puisqu’on ne change pas de voile. Je pense qu’un bon tacticien peut être aussi un bon joueur d’échecs. Tu te nourris de tes erreurs de toute façon. Il faut être très ordonné pour mettre les choses dans la bonne case, être capable d’accumuler les infos et de les hiérarchiser. Elles arrivent en permanence, les priorités changent. Il y a le vent, la mer, le courant, les concurrents… C’est cérébral et tu peux finir la journée avec une grosse migraine. En plus la communication à bord compte énormément, c’est très subtil, entre le futur, le conditionnel, l’impératif… » D’autant plus délicat quand, comme Jean-Luc, on court sur un bateau qu’on ne connaît pas (GBR 767), avec un équipage anglais…

Vent capricieux, résultats bouleversés

Jean Coadou a lâché la flotte en baie à 15 heures 10. Trois bateaux ont franchi la ligne avant le coup de canon et n’ont pas réparé. Parmi ceux-ci, Gavia Wilkinson-Cox (GBR 761), vainqueur de la course d’hier, qui compromet ainsi son résultat final sur la Gazprom International Dragon Gold Cup.

Sur le deuxième bord, dans la descente, 300 mètres avant la porte, le vent qui, jusque là, soufflait à 6 noeuds d’Ouest Nord Ouest a tourné au Sud Ouest. «J’ai dû faire un changement de parcours et les faire remonter au 270° pour équilibrer» expliquait le Comité. Du coup, sur l’eau, les chamboulements s’enchaînaient. Ainsi, RUS 34 de Vassilliy Senatorov, 21ème à la bouée au vent, était remonté à la 8ème place à la bouée sous le vent, pour franchir la ligne d’arrivée en tête. Markus Wieser (UKR 7) affichait une belle régularité en passant de la deuxième à la première place pour finir deuxième de la course. Il faut aussi souligner la belle performance d’Erik Orsenna (FRA 366) qui virait en 19ème position, premier Français à la bouée sous le vent, tandis que son compatriote Christian Guyader (FRA 365) reculait de la 28ème à la 56ème place à cette même bouée. Et sur la ligne, c’est Luc Pillot (FRA 386) qui sera le premier Français, après avoir oscillé de la 8ème à la 31ème place pour finir 19ème.

« C’était une journée géniale ! Hier, nous avons été disqualifiés et nous étions très motivés aujourd’hui. Nous sommes allés vite au bon endroit et dès la bouée au vent, nous nous sommes sentis bien. A bord, tout était harmonieux, parfait » racontait Vassilliy Senatorov à son arrivée au ponton.

Le podium du jour : RUS 34 ; UKR 7 ; SUI 311

 

 

 

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