Photos : © Christophe Migeon
La plongée dominicaise se fait sur la côte ouest, offerte aux caresses de la mer des Caraïbes et protégée des sautes d’humeur de l’Atlantique. Le long des promontoires volcaniques et des criques sableuses, l’île s’avère aussi surprenante au-dessus qu’au-dessous de l’eau.

Il faut bien donner une idée du décor, puisque la plupart des gens ignorent tout ou presque de ce petit jardin flottant. Elle a beau être voisine avec deux célébrissimes départements français d’outre-mer, il n’y a rien à faire, on n’arrête pas de la confondre avec la République dominicaine. Une vraie malédiction. Comme si sur les cartes, le regard, aimanté par la Martinique et la Guadeloupe, passait de l’une à l’autre sans pouvoir se fixer sur ce petit bout de terre émergée entre les deux. Il en vaut pourtant la peine.
Des fonds qui pétillent


Histoires de sorcières…

Aujourd’hui, ils sont moins de 3 000 retranchés dans une petite réserve au nord-est de l’île. Pour en revenir au site de ce matin, lové au pied d’une immense falaise de basalte, il faut préciser que les Caribes étaient polygames et n’aimaient pas pour autant que leur épouse aille courir le guilledou sous d’autres cases. Une légende tenace affirme que les épouses infidèles étaient fermement priées de sauter du haut de la muraille. Plus tard, le même promontoire semble avoir été utilisé au XVIIe siècle par les notables européens pour y faire voler les femmes soupçonnées de sorcellerie. Les diablesses qui parvenaient à tenir dans les airs étaient cueillies à l’atterrissage et conduites illico au bûcher. Les autres – probablement les plus nombreuses – se fracassaient à la surface de la mer dans de spectaculaires éclaboussures. Au moins avaient-elles la satisfaction de mourir innocentes.
… et de pirates
Sous l’eau, un vrai tombant bien vertical garni de gorgones et de buissons de coraux noirs part se perdre dans un bleu intense. Hélas, nulle trace de squelettes vermoulus. Les os de ces pauvres femmes ont dû s’entasser dans la cuvette du cratère à plus de 500 m de fond. Tortues et raies pastenagues survolent ces escarpements abrupts, reliques d’anciennes coulées de lave, aujourd’hui emmitouflées d’éponges et de madrépores.
Une vie discrète et coriace palpite dans les fissures et les cavités : des crabes violets avec des pinces comme des massues, des limaces de mer aux jupons aussi frisés que ceux des danseuses de french cancan, des crevettes nettoyeuses rouge et noir qui attendent le client sur leur pas de porte… Ici et là, de gros nuages de carangues ou de lutjans
explosent en gerbes argentées à l’approche des plongeurs. Il faut parfois penser à s’arracher à l’envoûtant spectacle du mur et de ses locataires pour se retourner, jeter un oeil dans le bleu et être parfois récompensé par le passage inquisiteur d’un thazard ou le vol fluide d’une raie-aigle. La baie de la Soufrière abrite sans doute la plus forte concentration de poissons de la Dominique. Tout le sud de l’île est une réserve marine segmentée en trois types de zones, les unes dédiées à la plongée et au snorkeling, les autres entièrement protégées pour les nurseries de poissons et enfin des zones réservées aux pêcheurs. Les patrons des pêcheries dominicaises affirment que tout se fait de façon artisanale et que le seul souci vient des bateaux pirates de Guadeloupe et de Martinique venus nettoyer illégalement les fonds en utilisant des méthodes destructrices. Non contents de ratisser la région au chalut, ils viendraient en plein jour menacer les petits pêcheurs locaux au fusil. De retour en surface, le spectacle de deux malheureux « pui pui » vient confirmer le côté très artisanal des pêcheries dominicaises : ces minuscules radeaux résultant de l’assemblage approximatif de bois flotté sont utilisés par des pêcheurs qui mouillent leur ligne unique à la main. Parfois, ils enfilent un masque de plongée et descendent tendre un hameçon timide aux poissons qui les intéressent. Pas vraiment de quoi menacer les stocks !
En remontant la côte vers le nord, le relief s’assagit progressivement. Les pentes douces de la région de Salisbury se révèlent propices aux rencontres intrigantes : poisson-crapaud embusqué dans l’encoignure d’une éponge du même jaune que lui, poisson chauve-souris maquillé comme un stand de fête foraine, grondin volant furibard aux pectorales ourlées d’un bleu électrique ou couple de poissons marionnettes exhibitionnistes sont quelques-uns des joyaux d’un étonnant cabinet de curiosités. Encore un peu plus au nord, et c’est la grande baie du Prince Rupert, avec ses dizaines de carcasses de cargos échoués le long des côtes comme un troupeau de cétacés fourbus. Ils finissent d’y rouiller à leur aise après une longue carrière de bourlingue caribéenne. Voilà qui aurait pu faire de splendides épaves. Sous les deux tétons volcaniques de la Pointe Cabrits, les courbes bathymétriques recommencent à s’affoler et s’effondrent brusquement à 300 m au milieu de la baie. Des éboulis rocheux, décrochés de la montagne parsèment la pente qui a désormais repris de la vigueur et s’amoncellent en grottes, tunnels et surplombs emmitouflés d’éponges et de madrépores. Des cliques de barracudas et de carangues bleues patrouillent dans ces eaux poissonneuses intégrées il y a peu au parc national de Cabrits. Ici encore, la Dominique cultive son image de petite sauvageonne des Antilles.
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Pratique

Quand y aller
On distingue une saison sèche de janvier à juin et une saison humide de juillet à octobre. Mais quel que soit le moment de l’année, il faut s’attendre à une ou plusieurs averses légères chaque jour. La température de l’eau varie entre 25 et 27°C. Risque d’ouragans de fin août à début octobre. Pour la voile, les alizés sont propices de juillet à décembre.
Les centres de plongée
Anchorage Hotel. 35 chambres en bord de mer un peu au sud de la capitale 
Buddy Dive. Un club à Roseau dans le Fort Young Hotel. Sortie deux plongées : 99 US$. www.buddydivedominica.com.
Sunset Bay Club. Pour plonger dans la région de Salisbury, au milieu de la côte ouest. Sortie deux plongées : 111 US$. www.sunsetbayclub.com.
Se rendre à la Dominique
Pour organiser votre voyage et/ou navigation sur-mesure : My Charter, info@mycharter.ch – mycharter.ch.


