Énorme aventure d’une rare intensité, les 5 jours du Léman se sont déroulés fin juillet avec une météo chargée d’orages et de fronts musclés. Cinq jours et cinq nuits sur l’eau, sans escale et sans assistance, une aventure faite d’endurance, de détermination et d’un brin de folie. Et à la fin, c’est Petit Tabac qui gagne!
« Il en faut du courage pour faire ce long voyage », comme le dit cette vieille chanson de marin. Les participants aux 5 jours du Léman sont des passionnés, jusqu’au-boutistes et courageux. Et il en faut du courage pour parcourir l’équivalent de sept Bols d’Or Mirabaud sur une semaine, sans escale ni assistance. En un mot, les participants à ce marathon du lac n’ont rien lâché et dans le groupe de tête, on a tenu bon jusqu’au bout dans cette édition très chahutée, c’est le moins qu’on puisse dire. Sitôt la ligne d’arrivée franchie au large du port de Vidy, les visages des concurrentes et concurrents étaient marqués. Toutes et tous affichaient une grande fatigue à l’issue de cette 31e édition, très éprouvante, comme l’expliquait le directeur de course Hubert Telfser: «Le menu météo de la semaine a été très chargé. Les fronts ont déferlé sur le plan d’eau. Par conséquent, on a eu des orages extrêmement violents et à répétition… La plupart des concurrents sont habitués à subir un orage; mais c’est assez peu courant d’en prendre quatre ou cinq en deux jours. Surtout que le premier, ils l’ont vécu en plein milieu de la nuit et il était très fort. Cette météo très musclée dès l’entame de la course a eu pour conséquence de peser sur le moral de certains et de détruire pas mal de matériel. En résumé, nous avons vécu neuf abandons dans les premières 24 heures. »
Nouveaux venus
Sur les 32 équipages en Surprise qui se sont présentés au départ de l’épreuve dimanche 23 juillet, seuls 23 ont terminé le parcours autour du lac. Soit une succession de boucles Vidy, Genève, Bouveret, Vidy… et ainsi de suite. À signaler, une nouveauté: « Cette année, nous avons décidé d’ouvrir la participation aux Grand Surprise. Inclure une autre classe de bateaux nous permet de démontrer la capacité des cinq jours à s’adapter à des évolutions dans le futur », explique encore Hubert Telfser. Cinq unités se sont présentées au départ et on compte un abandon dans cette catégorie. Pour mémoire, il faut rappeler que les 5 jours du Léman s’apparentent à une véritable course d’endurance. C’est la plus grande course en double, en eaux fermées et sans assistance. L’objectif des 5 jours du Léman est simple : en un temps limité de cinq jours, il s’agit de comptabiliser le plus de tours du lac à bord de voiliers monotypes Surprise, et depuis cette année en Grand Surprise. Les bateaux sont munis de balises qui permettent au public de les suivre 24 heures sur 24 en temps réel. Un événement sportif, mais surtout une aventure humaine hors du commun.
Une course au contact
Julien Brunet et Frank Reinhardt, vainqueurs souriants et heureux de cette 31e édition des cinq jours du Léman, reconnaissent avoir eu un peu de chance et aussi avoir un peu forcé leur destin. Un bel exploit pour les deux amis de longue date, qui se connaissent depuis l’âge de 15 ans: «C’était une grosse édition et au niveau conditions, c’était incroyable. On fait sept descentes du lac ou… montées ! On est monté au près dans l’ouest sept fois de suite. Et pas une seule fois dans autre chose que du vent soutenu d’ouest. On a quand même eu deux trois bonnes pétées d’orages, du solide, mais on les a assez bien passées, sans casse! On a fait une course un peu comme on l’avait imaginée et puis il faut avoir aussi un peu de réussite. Gagner, c’est impossible sans ça», raconte Julien Brunet. «Au fond, on n’a jamais été devant, on a toujours été un peu derrière le paquet. Ce n’était pas grave, on n’était pas trop loin et on essayait de revenir. On est passés en tête au prologue et après la première nuit on s’est vautrés, on passe en 22e position au Bouveret», explique aussi Reinhardt.
«Le début de course ne s’est pas déroulé totalement comme on l’avait prévu, mais ça nous a donné envie de nous accrocher et le plaisir est resté tout au long de l’épreuve. On a eu la conviction qu’on pouvait revenir et finir au moins à la deuxième place, on avait l’impression que le premier était parti loin devant. Il y a eu des conditions musclées tout au long et, du coup, c’était compliqué à récupérer. On est vraiment contents d’avoir gagné, parce qu’on a eu l’impression de jouer contre des équipages solides», conclut Julien Brunet.
Petit Tabac, le vaillant Surprise des deux compères, a coupé la ligne en vainqueur après avoir parcouru la distance de 954,8 kilomètres. À quelques heures de terminer leur pensum, ils étaient six dans un mouchoir de poche à pouvoir prétendre à la victoire. Finalement, c’est Petit Tabac de Brunet-Reinhardt qui franchit la ligne en tête, suivi du duo Mathieu Sistek-Tugdual Becquemie sur Sos Oxygène et des poursuivants directs Marius Lanz et Thomas Lepère sur Malice, qui assurent leur place sur le podium. Suspense et bouleversements, il y a eu! Puisque Korteldesign, avec à son bord Denis Cortella et le spécialiste du large Pierre Leboucher, a vu la tête lui échapper cruellement après plusieurs jours en pole position.
Quatre équipages féminins participaient à cette 31e édition de l’épreuve. Ces femmes ont toutes été classées et, en Grand Surprise, c’est le duo Bernard Borter et Yan Perret-Gentil sur Savoy Verre-Little Nemo qui s’impose.