Partir au large pour mieux revenir. Une expérience qui marque la vie d’un marin et fait rêver ceux qui ne sont pas encore partis. Avec mes quatre membres d’équipage, nous avons enfin pu vivre notre aventure au long cours en optant pour une location one-way des Açores à La Rochelle.

Le rêve d’une vie

Entre vouloir se lancer et pouvoir se lancer, il y a tout de même un sacré fossé. Nos vies bien remplies ne sont souvent pas en adéquation avec la lenteur d’une traversée océanique. Avec mon équipage, composé au total de cinq personnes – moi inclus – nous avons opté pour une solution autant pratique qu’unique. Une « demi-transat » retour au départ des Açores, grâce à une location one-way sur un bateau sûr et performant : un Pogo 36. À la découverte quelques mois auparavant de ce concept de location sur-mesure de petits croiseurs océaniques rapides, j’avais finalement en face de moi une offre qui correspondait à la fois à mes contraintes – de temps – et mes besoins – de sensations. C’est ainsi que je fis la rencontre de Jean-Marc Calmet, le patron la petite boîte Open Sail. À lui seul, cet entrepreneur gère une flotte de deux Pogo 12.50, un 36 et un 30. « Partir des Canaries aux Caraïbes ? », lui ai-je demandé. « C’est possible ! », me répondit-il. « Un tour express des Baléares au départ du Sud de la France ? », l’interrogeais-je encore. « C’est une option », accorda- t-il. « Et partir des Açores pour revenir à La Rochelle au mois d’avril ? », tentais-je. « Super idée, s’enjoua-t-il. J’ai justement un équipage qui est prévu sur la transat retour des Antilles aux Açores, vous pourriez prendre le relai. » L’affaire fut ainsi conclue et nous prîmes rendez-vous à Horta, sur l’île Faial, avec Aminata, notre futur bateau.
Immanquables Açores

Presque toujours fumant, cet archipel isolé est né il y a huit millions d’années (seulement) de l’action combinée de la dorsale océanique médio-atlantique et d’un point chaud. Ses arrêtes encore acérées et ses tombants vertigineux sont encore là pour attester de son jeune âge. Ici, pas question de se prélasser au mouillage sans une chaîne de plusieurs centaines de mètres ! Cependant, de petites marinas souvent chaleureuses et pittoresques font surface petit à petit. Elles accueillent à bras ouverts les plaisanciers. Depuis Horta, l’île de Pico est distante d’à peine 3 milles. Sorte de mont Fuji de l’archipel enrobé de quelques névés printaniers lors de notre passage, son point culminant se situe à 2351 m. Pico détient non seulement le record du plus haut sommet du Portugal, mais également celui de la plus jeune île des Açores, « à peine » 250 000 ans. Les marcheurs devraient se réserver une journée pour en tenter l’ascension, plus de 1000 mètres sont à parcourir depuis le camp de base situé à 1310 mètres. Attention, une inscription au bureau des guides ainsi que l’acquittement d’une taxe de 12 euros par personne sont obligatoires. Chaque randonneur se verra par ailleurs confier un appareil GPS qui permettra aux secouristes de retrouver les brebis égarées. Quelques incidents surviennent de temps à autre, gardons à l’esprit que le temps change rapidement aux Açores !
L’étape suivante, à ne manquer sous aucun prétexte, se trouve à une dizaine de milles au nord-est. Composée d’une succession de plus de 200 volcans d’origine basaltique, l’île de São Jorge est longue de 55 km pour une largeur maximale de seulement 7 km. En longeant ses côtes, on ne décroche pas le regard de ses imposants tombants rocheux en continu, atteignant parfois plusieurs centaines de mètres. La municipalité de Velas, forte de ses 5000 âmes, est la principale agglomération de l’île. Son port, dont les catways sentent encore le plastique frais, est niché au pied d’un ancien cône volcanique. La nuit, un étrange concert est donné par les autres locataires des falaises, les puffins cendrés. Ces oiseaux migrateurs, que vous pourrez rencontrer assoupis sur l’eau durant vos navigations, s’en donnent à coeur joie la nuit et batifolent jusqu’à l’aube, période de reproduction oblige. Une production artistique surprenante, bruyante et amusante, mais qui n’empêchera pas le marin de sombrer dans son sommeil. Avant de larguer les amarres, pensez à faire un détour par les fameuses Fajãs, sortes de petites piscines naturelles issues des formations volcaniques.
Précieuse Graciosa
Avant de quitter les contours rassurants des îles, nous fîmes une dernière escale sur Graciosa, la terre la plus septentrionale des Açores. Ce confetti de 8 km de long sur 4 de large peut se parcourir entièrement à pied, à travers champs. Cette île minuscule, bucolique et peu connue vaut véritablement le détour. Sa caldeira peut faire l’objet d’une magnifique randonnée offrant un panorama à 360° sur l’île et sur l’océan. Il est possible de s’amarrer au port de Santa Cruz, la ville principale, mais également de faire escale à l’entrée du petit port de pêche de Praia situé à l’est, en faisant toutefois attention au tirant d’eau. Avant de quitter Graciosa et avec elle la civilisation, je profitai de cette dernière escale pour marcher, engranger les kilomètres et remplir ma mémoire des dégradés de verts et de bleus uniques dont regorgent les paysages açoréens.
Vivre en mer, vivre penché

PRATIQUE
Quand partir ?
Mai constitue en général la meilleure période pour une transat retour. En été, l’anticyclone des Açores peut être très étendu et ainsi contraindre les équipages à aller chercher les airs très loin au nord, ou pire, à effectuer une grosse partie du trajet au moteur.
Se préparer :
Bien sélectionner son équipement peut éviter bien des tracas, car une fois les amarres larguées, pas de retour en arrière possible. Tout sèche difficilement lors d’un tel périple, pensez donc à vous équiper de nombreuses chaussettes, de vêtements thermiques, d’une voire deux paires de lunettes si l’une est portée disparue en mer. Concernant le ciré, j’ai essayé la veste de quart Henri Lloyd Transocean en TP3. Beaucoup moins onéreuse qu’une veste en Gore-Tex, elle offre une protection imperméable impeccable. Son col très haut et sa capuche à panneaux transparents m’ont été très utiles lorsque nous avons commencé à ramasser des litres d’eau sur la figure. Pour ma salopette, j’ai opté pour du Gore-Tex avec le modèle Elite Racer d’Henri Lloyd. Cette matière légère, respirante et souple reste le must, et je dois dire que l’eau n’a jamais passé la barrière de la salopette. Autre partie du corps très exposée : les mains ! En particulier la nuit, le port de gants humides peut être très incommodant. Sur ce type de trajet, je conseille vivement de s’équiper d’une paire de gants en néoprène comme le modèle Pro-Grip d’Henri Lloyd. Tout est disponible dans le plus grand magasin nautique de Suisse : bucher-walt.ch.
La météo :
Le routage est un formidable outil pour programmer votre route. Il faut cependant l’utiliser intelligemment tout en prenant en considération l’état de la mer et le fait que vous ne serez sûrement pas aussi rapide que vos polaires. Selon le modèle météo utilisé, pensez que la force du vent peut être largement sous-estimée en sachant qu’il s’agit de valeurs moyennes. Au plus fort, GFS nous indiquait 30 noeuds de vent alors que nous avons eu près de 46 noeuds établis et 53 en rafales.
Vivre votre aventure sur mesure en Pogo
Foncez et contactez Jean-Marc Calmet : contact@open-sail.com ou +33 6 11 86 82 26. Ou rencontrez-le sur son stand lors du Salon Nautique du Léman du 2 au 4 novembre prochain.
Pour organiser votre croisière surmesure aux Açores :
My Charter, info@mycharter.ch, mycharter.ch Ou Voile Évasion, fabienne@voile-evasion.ch, voile-evasion.ch.
