Notre programme: une croisière de rêve avec des windsurfers «chasseurs de vagues» à travers les Iles Sous-Le-Vent, au cœur de la Polynésie française. Nous chargeons nos vivres à bord de Cara, superbe catamaran de près de douze mètres et larguons les amarres en fin de matinée. Direction le lagon et ses multiples «motus». Le bateau est confortable, nous filons sous grand-voile et génois à 7-8 nœuds plein largue… Tout est balisé. La carte détaillée mentionne nos points de repère et les nombreux dangers du lagon. C’est un jeu d’enfant que de suivre les balises vertes et rouges qui jalonnent un parcours idéal qu’un débutant pourrait emprunter sans soucis. Sergio, notre skipper, veille au grain et donne les ordres à son équipage de choc. Pensez donc: Carine Camboulives et Manu Bouvet, spécialistes des trips windsurf dans les endroits les plus reculés de la planète, accompagnés d’une jeune mousse de 9 mois, nommée Lou. Et pour renforcer le team, Baptiste Gossein, windsurfer pro, et présumé roi de la chasse sous-marine (heureusement que l’on n’a pas compté sur ce dernier point!). Les montagnes plongent dans le lagon translucide, la lumière est vive et nous renvoie ces images que l’on attendait tant… Nous sommes à l’intérieur d’une carte postale au cœur de la Polynésie.
Le plus bel apéro du monde
Après quelques milles de grand largue, nous repérons un motu de rêve pour mouiller Cara. Tout l’équipage est ébahi par le décor. Une petite vérification de la nature des fonds, pas d’obstacles aux alentours et nous jetons l’ancre. Il ne faut pas nous pousser pour que l’on se jette à l’eau. Comble du bonheur, l’alizé est en train se renforcer, ce qui nous laisse envisager une belle séance de windsurf juste après notre déjeuner. Derrière notre mouillage, un autre motu cache un spot de freeride de incroyable! Le trampoline de Cara est idéal pour gréer nos petites voiles de planche et mettre à l’eau en toute sécurité. La même histoire en monocoque serait sans doute moins facile. Carine, la première à s’élancer sur sa planche, trace sa route entre les nombreuses patates de corail à plus de 20 nœuds… Gare aux ailerons! Évidemment ce qui devait arriver arriva, contre-jour aidant, elle s’offre un aileron de rechange dans les dix premières minutes. Reste deux semaines de trip et plus qu’un aileron pour sa planche de freeride. Il va falloir être vigilant, d’autant plus avec le cata qui n’a pas le même tirant d’eau qu’une planche de windsurf… Baptiste est plutôt un spécialiste de la navigation dans les vagues. Mais, il est pour le moment chargé de la photo freeride main dans l’eau, sourire type «Colgate» et on peut dire que ça lui va plutôt bien. Quant à Manu, le programme n’est pas pour lui déplaire, c’est un habitué des photos relax en famille sur lagons de rêve. Nous passons l’après-midi à immortaliser cette première nav’ puis bien éclatés par quelques heures de glisse sur la piscine géante, on s’offre un premier apéro sur fond de motu. C’est ça aussi les joies de la croisière.
Mouillage de rêve le jour… et cauchemar la nuit
Ce qui peut s’avérer paradisiaque au coucher du soleil peut vite devenir cauchemardesque quelques heures plus tard. En plein milieu de la nuit, nous sommes tous réveillés par un bruit sourd qui racle sous le fond du bateau… sous une coque, puis brusquement sous l’autre! Ni une ni deux, nous nous retrouvons sur le pont. Le vent souffle à plus de 25 nœuds, le léger clapot du lagon s’est transformé en petite houle croisée, la chaîne est archi tendue mais le mouillage est orienté dans le sens contraire du vent! Le courant a changé de direction et entraîne notre catamaran vers le vent. Nous avons fait un 180° autour du mouillage, d’où le bruit de la chaîne raclant les deux coques. Impressionnant! Mais le plus grave, c’est notre jet-ski amarré à l’arrière qui est passé entre les deux coques. Résultat: capot cassé, voie d’eau et bonne galère en plein milieu de nuit pour essayer de colmater. Pour une première nuit au paradis, on a vu mieux! Le lendemain, l’équipage est plutôt claqué, et surtout désireux de chercher de meilleurs abris pour les nuits à venir. Mais le soleil a vite fait de nous faire oublier les affres de la nuit, et nous levons l’ancre, impatients de découvrir les kilomètres de côte à notre portée. Grand-voile, génois, on borde et c’est parti pour une nouvelle ballade à travers l’immense lagon. Baptiste n’est pas du genre à rester inactif dans le trampoline pendant la navigation. Il ne tarde pas à préparer son propre matos pour se jeter à l’eau et tourner autour de Cara confortablement calé dans ses straps.
Windsurf hardcore sur vague parfaite
Nous sommes chaque jour subjugués par le caractère exceptionnel de l’environnement. Les dégradés subtils de bleus sur le lagon géant, les visites de dauphins, petits requins et les sessions de freeride qui s’enchaînent… Avec cette douceur de vivre, nous en venons presque à oublier notre quête du Graal, celle qui nous a poussés jusqu’ici: les vagues parfaites de Polynésie. Et en termes de dimensions nous avons été servis… Une grosse houle en provenance directe du Sud Pacifique nous a offert des séries tubulaires de 4 à 5 mètres. Largement de quoi faire pour que nos windsurfeurs pros puissent s’exprimer au mieux. Le jeu est simple, prendre la houle au large, revenir avec elle pour la surfer et envoyer un maximum de belles courbes dans le creux de la vague. Elle déferle rapidement sur le fond de corail tranchant et presque à sec. En cas de chute, la sanction est sans appel! Hors de question de se laisser enfermer dans la dernière section qui achève sa course dans un fracas terrifiant. Prudent sur les premières séries, Manu assure quelques beaux surfs, en se prenant au jeu avec beaucoup de lucidité et en se permettant d’attaquer ses « takes off » de plus en plus profondément. Baptiste, lui, cherche l’aérial, mais la déferlante est sauvage et ne se laisse pas intimider facilement. Poussée d’adrénaline en flot continu garantie! Et bien évidemment, nous sommes seuls sur cette passe. Après quelques heures de plaisir total, épuisés par tant de plaisir et se sensations fortes, nous nous retrouvons à bord de Cara pour visualiser les premières images de cette session magique.
Mouillage de cascadeurs pour freeride de luxe
Dans une petite baie à l’abri de la houle, et derrière une belle collection de patates à moitié immergées, nous avançons au ralenti; Sergio à la barre et tout l’équipage sur le pont pour indiquer les obstacles. Personne à l’horizon, deux mètres d’eau translucide, quelques patates pour le plaisir de la plongée et une île déserte en guise de fond d’écran. Chaque jour, Sergio et Baptiste partent à la pêche et tous les moyens sont bons, le harpon, la traîne et surtout la persévérance! Les résultats sont plutôt inégaux mais quel plaisir de déguster de temps en temps un poisson cru fraîchement ramené par les potes, le tout arrosé d’une petite Hinano. Notre petit mousse, Lou, s’est habitué à sa nouvelle maison. L’espace du carré est restreint mais le paysage lui convient… Il faut la voir rire aux éclats quand elle aperçoit Carine sur sa planche! Mais le meilleur moment restera sans doute celui de sa découverte du milieu marin et des raies! Imaginez-vous dans un mètre vingt d’eau, entouré de raies qui viennent vous manger dans la main affectueusement!
La Polynésie française ne se résume pas aux lagons et aux belles vagues; ce que nous retiendrons surtout c’est la gentillesse et la sincérité des habitants. Cette douceur de vivre se traduit avec le langage et le tutoiement systématique. Un environnement merveilleux, des coutumes préservées, une hospitalité rare et un sourire permanent sur les visages. La saveur du poisson cru, alliée au charme des danses traditionnelles, qui ne se retrouve nulle part ailleurs! Personne ne ressort indemne d’une croisière dans les Iles Sous-Le-Vent.