Photos : ©Héloïse Martin
« Partir ». Pour certains, il s’agit d’un rêve, d’un désir lointain, pas vraiment compatible avec les contraintes du présent. Pour Héloïse Martin, ancienne du chantier Outremer, le voyage a commencé. Après plusieurs années passées à promouvoir les bienfaits des grandes croisières, elle a fini par larguer les amarres. Naturellement, c’est à bord d’un Outremer 5X que cette dernière a pris le large. Voici son histoire.

Le voyage n’est pas une parenthèse
Diplômée d’un master en marketing, j’ai enchainé avec un poste de responsable marketing pour la marque de catamaran Outremer. Un groupe en plein essor, avec un esprit start-up, des bateaux de grande qualité, un management fédérateur. Bref, un job de rêve au sein d’un environnement privilégié. Les années passent et quelque chose me taraude… Cette place, même si j’en mesure la chance, n’est pas la mienne.
Je rêve de voyage, de rencontres, de repousser mes limites, de me soustraire aux contraintes du « métro-boulot-dodo », d’explorer une fibre artistique un peu bridée, d’inventer mon propre mode de vie… Il est temps pour moi de sortir de ma chrysalide. Passer du rêve à la réalité n’est pas chose simple : incompréhension de l’entourage, évaluation des risques, rupture du contrat de travail, préparation du voyage, on trouve toujours des milliers de bonnes raisons pour ne pas passer le cap.

Ce lâché-prise des deux mains, boosté à la soif de vivre et à l’envie furieuse de réaliser ses rêves, a nécessité une grande dose de courage, une organisation rigoureuse, une volonté d’acier… Tout quitter pour comprendre l’essentiel, ici et maintenant. « Je vous souhaite des rêves à n’en plus finir et l’envie furieuse d’en réaliser quelques-uns », disait le grand Brel.
La magie d’une transatlantique

Les alizés propulsent le bateau à une moyenne confortable de 12-13 noeuds. Nous alternons entre gennaker et grand spi et affinons sans cesse les réglages pour que le catamaran bénéficie des meilleures performances. On se chamaille comme des enfants pour barrer, le pilote n’a qu’à bien se tenir, à nous les pures sensations ! Même à 20 noeuds dans une mer formée il ne grince pas, on se sent protégé comme dans un cocon. À l’intérieur, on retrouve tout le confort de la maison : literie moelleuse, cuisine « grand chef », salles de bain lumineuses et bien ventilées. Merci à la propriétaire qui a fait un avitaillement digne d’un restaurant étoilé : fruits et légumes jusqu’à la fin de la traversée, plats mijotés et poisson frais quand nous pêchons, pain du jour.
Un jour, Éole nous délaissa. Je demandais au capitaine de ralentir l’allure des moteurs pour plonger dans l’océan – 8 km de fond, de quoi donner le vertige. À la surface de cette immensité, je ressentais simplement que nous ne sommes rien d’autre que des poussières d’étoile. Vivre en mer invite à la rêverie et à la contemplation : admirer les mille nuances de bleu, écouter le silence d’azur, se réjouir du balai quotidien des dauphins, et des plus rares apparitions de baleines. On oublie l’heure. Le soleil et les étoiles nous guident. Les jours passent, on n’attend plus le week-end. Exilés dans l’instant, hors de nos frontières.
Terre en vue ! On saute de joie : un restaurant, des gens, la terre, le réseau ! Malgré l’excitation, je ressens un petit pincement au coeur au moment de mettre le pied à terre : je n’ai presque pas envie de quitter le bateau ! Cette zone du dehors, cette liberté, dont les seules règles sont celles fixées par les éléments. Sept heures de vol auraient suffi pour arriver à ma destination, nous avons mis 16 jours. Mais finalement n’est-ce pas ça aussi le voyage ? Alors si l’expérience vous tente, n’hésitez pas. » La mer, la mer, toujours recommencée, écrivait Paul Valéry. «
La suite du programme ? Les Antilles, douceurs et contrastes. Cuba la révoltée. »