Valentin Gautier et Simon Koster peuvent inscrire une véritable « Bataille de Normandie » à leur palmarès. Le 18 septembre, à bord de Banque du Léman,
le tandem de choc a remporté la Normandy Channel Race dans des conditions très difficiles et au terme d’une course qui ressemblait à un sprint endiablé.

Texte : Jean-Guy Python

Le Class40 Banque du Léman, co-skippé par Valentin Gautier et Simon Koster, a remporté une victoire de prestige en s’adjugeant la Normandy Channel Race au terme d’un final haletant.

Partie de Caen et de retour dans cette même ville des côtes normandes, cette épreuve emmène les concurrents sur environ 1’000 milles en Manche et en mer Celtique. Un parcours varié, pour moitié le long des côtes de France, d’Angleterre et d’Irlande et pour moitié au large, en Manche et en mer Celtique. Cette course exigeante se déroule dans des zones de navigation complexes permettant tous les jeux tactiques à un rythme très élevé. C’est un véritable sprint d’une semaine, mais aussi un magnifique périple, de la Normandie à l’Irlande, en passant par la côte sud-ouest anglaise et les îles Anglo-Normandes.

Banque du Léman s’est imposé avec six minutes d’avance sur les favoris Ian Lipinski et Julien Pulvé, à bord de Crédit Mutuel. Après un final musclé en Manche, au près et dans une mer formée, les Suisses ont franchi la ligne d’arrivée au large de Ouistreham après 4 jours, 20 heures et 25 minutes de course. Ian Lipinski, double vainqueur de la Mini-Transat, vainqueur de la dernière Jacques Vabre, n’avait pas connu la défaite depuis 2015. Ce qui naturellement réjouit Valentin Gautier : « Franchement, on ne l’a pas volée celle-là ! On a dû se battre tout au long de la course. La Normandy Channel Race, c’est un parcours hyper favorable aux coups de Trafalgar! En fait, c’est sans arrêt revenu par l’arrière, la concurrence était vraiment rude et en plus on a fini dans des conditions totalement dantesques ». C’est ce qu’expliquait Valentin peu après l’arrivée, alors que les deux navigateurs du Roesti Sailing Team remontaient au moteur, le chenal paisible qui devait amener le duo victorieux jusqu’à Caen.

Une victoire au sprint

Valentin Gautier analyse cette victoire qui s’est jouée sur le fil du rasoir: «Cette course, c’était comme de grands sprints par étapes. Il y a eu juste deux phases où on a pu se reposer un peu. Le parcours fait qu’on passe dans des zones avec beaucoup de courant et des parties de navigation très techniques et il faut vraiment être à fond sur ces zones-là, sinon tu peux perdre vraiment gros. Il y a de vrais passages à niveau semi-hauturiers et cette année, il y avait beaucoup de transition et des molles à ces endroits. Ce qui fait qu’on n’a pas eu la possibilité de se reposer du tout. Dans la dernière remontée de la Manche, on a tiré à fond sur la machine. Lors du dernier bord, Crédit Mutuel a voulu clairement nous attaquer. À 45 milles de l’arrivée en passant le Raz de Barfleur, ils sont arrivés un peu trop par en dessous, ils ont eu du mal à passer la pointe et ils ont dû lofer. Nous, on était plus au large, on avait plus de courant avec nous, et c’est vraiment là qu’on a réussi à leur glisser devant et à les contrôler jusqu’à la ligne d’arrivée, qu’on a passée avec juste deux miles d’avance sur eux».

RETOUR MUSCLÉ SUR CAEN AVEC 40 NŒUDS DE VENT DANS LES RAFALES ET DES CREUX DE TROIS MÈTRES POUR BANQUE DU LÉMAN.
APRÈS UNE LUTTE SERRÉE CONTRE BANQUE DU LÉMAN, IAN LIPINSKI ET JULIEN PULVÉ SUR CRÉDIT MUTUEL ONT FINI DEUXIÈME.
VICTOIRE POUR VALENTIN GAUTIER ET SIMON KOSTER QUI SABRENT LE CHAMPAGNE À L’ARRIVÉE. « FRANCHEMENT, ON NE L’A PAS VOLÉE CELLE-LÀ ! »

Deux jours très durs pour finir

Une course qui en aucun cas ne s’est apparentée à un parcours de santé : « Les deux derniers jours, tous les concurrents ont cassé quelque chose parce que la mer était vraiment épouvantable. Pour nous c’était la têtière de grand-voile endommagée. On a eu jusqu’à 40 nœuds en plein pif dans les rafales de vent et il y avait quasiment trois mètres de mer avec des périodes de six secondes, donc en réalité une mer très courte et croisée avec un immense coefficient de marée. 3 nœuds de courant dans un sens et 3 nœuds dans l’autre. En résumé 35 nœuds de vent contre trois nœuds de courant, ça donne vraiment un truc abominable. Mal de mer en prime», expliquait encore Valentin Gautier, épuisé.

À l’aube du dernier jour de course, Banque du Léman naviguait à la deuxième place, au près dans 30 nœuds de vent, avec des rafales à 40 nœuds. «La victoire s’est jouée sur une bonne option stratégique. La Manche était absolument effroyable, avec des vagues de trois mètres et des courants très violents. Nous avons vraiment puisé dans nos réserves, et là, à l’arrivée, nous sommes démontés ! On ne dira plus jamais que les Suisses sont les champions du petit temps après ça! Nous sommes aussi extrêmement heureux d’avoir débloqué notre compteur dans la classe de 40 pieds!», termine Gautier.

Quant à Simon Koster, fortement séduit par la ville de Caen, il se promettait un samedi soir festif, histoire de célébrer dignement cette victoire… et peut-être aussi de saisir l’occasion de remettre son oreille interne à l’heure terrestre!