Verrons-nous bientôt plus de femmes que d’hommes s’aligner sur les régates? Lancée par la SSLA, l’initiative «Women Sailing» englobant des stages au Tessin et la Women’s Cup, a permis de faire avancer la voile féminine de manière considérable. Avec la Women’s Sailing Champions League organisée à Lausanne au mois d’octobre prochain et la ligue féminine en 2023, les navigatrices ont de quoi se réjouir.

Texte : Walter Rudin

Ce n’est pas tous les jours qu’une régate en Suisse réussit à rassembler 200 navigatrices d’un coup. Record absolu, 18 équipages s’étaient inscrits à la Women’s Cup sur le lac de Bienne. En amont, les places pour les deux stages organisés au Tessin avaient été prises d’assaut. Plus de 70 femmes souhaitaient approfondir leur savoir-faire vélique et profiter de l’encadrement professionnel.
Après avoir remporté l’organisation de la Women’s Champions League en Suisse, la SSLA a décidé de lancer une campagne pour promouvoir la voile auprès des femmes. La réalisation a été confiée à Marlène Rump, qui s’est attelée à élaborer un concept avec le soutien de Markus Bläsi. Au cœur du concept se trouvaient les deux stages de formation qui se sont déroulés ce printemps au Tessin. «Apparemment, c’est un soulagement pour beaucoup de femmes de se retrouver entre elles, a constaté Marlène Rump. Beaucoup ont le sentiment de pouvoir enfin poser toutes les questions qui leur brûlent les lèvres et essayer des choses qu’elles n’ont pas souvent l’occasion de faire. Je pense que nous avons réussi à en motiver plus d’une à participer à la ligue tout en renforçant leur confiance sur un bateau. Nous allons certainement proposer des nouveaux stages pour femmes.»

Pour les débutantes et les aguerries

Présidente du Yacht Club Zug (YCZ), Claudia Streuli a embarqué pas moins de sept femmes pour participer au stage à Ascona. Le club avait acheté plusieurs bateaux et posé ainsi les bases pour intéresser aussi des navigateurs qui ne possèdent pas d’embarcation. Afin d’intégrer les nouvelles arrivantes, il a mis sur pied une flotte spécifique SSLA et créé un groupe constitué uniquement de femmes. Bien décidées à saisir cette chance unique, elles sont hautement motivées à acquérir les compétences nécessaires pour régater. «Aujourd’hui, notre équipage est très soudé. Nous avons une grande confiance en nous, a relevé Claudia Streuli à l’issue du stage. Nous avons beaucoup profité des conseils et astuces de notre entraîneur prodigués avec un calme inébranlable et les vidéos commentées nous ont fait beaucoup progresser.»
Pour les femmes du Segelclub de Männedorf, la situation de départ était tout autre. Ayant participé à la Women’s Cup à Davos, elles disposaient déjà des bases nécessaires. Pour elles, le stage a surtout permis de créer un nouvel élan et d’approfondir leurs compétences. Selon Madeleine Maurer, l’expérience a été très bénéfique: «Avoir le retour d’un coach sur l’eau est toujours très utile. Silke Basedow est une véritable championne en J70, capable de nous expliquer comment réussir les manœuvres et de partager son expérience acquise au sein d’équipages féminins. Compte tenu de notre poids généralement plus léger et de notre force musculaire, il faut trouver le moment optimal pour lancer les manœuvres.»

La Coupe voit son niveau augmenter

Peu après le deuxième stage, Bienne a accueilli la Women’s Cup. Les «Clinics» ont-ils déjà déployé leurs effets ? Marlène Rump en est convaincue: «Il y avait beaucoup de bonnes équipes sur place et certaines ont probablement réalisé des progrès grâce aux camps. Selon nous, le niveau des équipes féminines ne cesse d’augmenter.» Madeleine Mauerer de Männedorf partage son avis : «Nous avons nettement amélioré nos manœuvres et aussi nos départs. Nous manquons encore de régularité, mais nous avons beaucoup de plaisir à évoluer ensemble. La preuve, nous avons remporté la dernière course en menant du début à la fin.»

Événement majeur rondement mené

Mettre sur pied un évènement avec seulement six bateaux, mais 18 équipes dont chacune dispute huit courses en l’espace de trois jours, relève d’une logistique hors norme. Fin connaisseur des conditions de vent sur le lac, l’YC Bielersee a saisi la moindre occasion pour lancer une course. Dès le premier jour, quatre manches ont pu être courues. Mené par Elia Borrego Arnau, le Yachting Club of Cern, a pris la tête avec trois victoires de manche sans réussir pourtant à confirmer ses bons résultats par la suite. Samedi, c’est l’équipe du CN Morgien, constituée d’illustres navigatrices, qui a pris la tête du classement. Avec beaucoup d’assurance, Manon Kivell Luther à la barre, les navigatrices olympiques Nathalie Brugger et Maud Jayet, la championne du monde de Nacra 15 Noëmie Fehlmann ainsi que Fiona Testuz ont conservé leur avance pour remporter le titre, alors qu’elles n’avaient jamais régaté dans cette configuration auparavant. «Le niveau à Bienne était élevé et nous avons dû batailler ferme, mais nous étions là nous faire plaisir et découvrir la série ainsi que le concept de la Women’s League. Nous sommes conquises», a déclaré Nathalie Brugger après la régate. L’équipe du YC Bielersee2, avec Lea Tschudi à la barre, a réussi à devancer le champion sortant RC Oberhofen le dernier jour et s’adjuger la 2e place.

La ligue féminine pour 2023

Marlène Rump prépare déjà le prochain grand événement. Début octobre, la Women’s Champions League se déroulera à Lausanne. Pour la Suisse, quatre équipes se sont qualifiées : le RC Oberhofen, le CN Morgien, le YC Arbon et le YC Bielersee. Elle ne compte toutefois pas s’arrêter là. «L’année prochaine, nous lancerons la Swiss Sailing Women’s League qui se déroulera sur deux week-ends. Il y aura également un événement féminin en format ouvert à Spiez», annonce-t-elle.