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Daniel Rossier: Commodore du Cruising Club de Suisse

par Brice Lechevalier

Photos | René Koster

En reprenant l’an passé la présidence du CCS, quelles ont été vos priorités ?

skippers-ipad-fr-60-147Il y a 18 mois, lorsque j’ai repris après une interruption de 10 ans la présidence du CCS, deux visions s’affrontaient alors : l’une préconisait la professionnalisation de ses structures et l’autre le maintien du système de bénévolat actuel avec un soutien, lorsque nécessaire, du secrétariat général. Avec 7000 membres, le club est trop petit pour être professionnalisé mais dans certains domaines, les limites du bénévolat ne sont pas loin d’être atteintes. Le système de milice cher aux Suisses l’ayant emporté, l’introduction d’une nouvelle informatique de gestion devenait incontournable. Elle devra permettre de simplifier et de codifier les quelque 220 processus existants et d’apporter un soutien au secrétariat général, aux groupes régionaux ainsi qu’aux nombreux bénévoles. Une nouvelle direction de club a été mise en place. Son objectif principal a été de rétablir le calme et la confiance parmi les membres ainsi que de raffermir les liens avec l’Office suisse de la navigation maritime, l’Office fédéral des communications et la Royal Yachting Association pour l’enseignement. Il faut rappeler que lorsque le CCS a été créé en 1955, son but était de former les navigateurs suisses à affronter les conditions de la navigation en mer en toute sécurité et d’organiser des croisières sur son propre bateau de club. Aucune législation suisse n’existait alors et le CCS tenait le registre des bateaux, établissait les documents officiels, les permis mer, le pavillon en toute illégalité, mais avec succès. Cette situation a perduré jusqu’en 1972, année qui a vu la Confédération légiférer et charger l’Office suisse de la navigation d’assumer officiellement ces charges.

 

Si vous deviez définir le CCS d’aujourd’hui en trois phrases, que mettriez-vous en avant ?

Aujourd’hui, 14 groupes régionaux et d’intérêts sont répartis dans le pays, ils développent une importante activité associative et organisent principalement les cours pour l’obtention du permis mer et des formations complémentaires. Le central organise les croisières, gère les bateaux du club ou loués, assume la formation des skippers et des seconds. Il soutient les groupes régionaux, en particulier dans l’enseignement, et fait passer les examens du permis mer avec la capacité de l’établir le cas échéant.

Vous proposez par ailleurs une formation hauturière pour les jeunes, en quoi se distingue-t-elle ?

Comme tout club sans mouvement junior, le permis hauturier ne s’obtient qu’à partir de 16 ans, le CCS est sensibilisé au recrutement des jeunes et surtout à les garder sur le long terme. Les groupes régionaux offrent des conditions financières très favorables pour la formation. Le central accorde un rabais de 50 % pour les jeunes en formation sur les croisières et demande une cotisation réduite.

Votre flotte est assez hétérogène et comprend aussi un bateau à moteur, mais pas de multicoque, comment la faites-vous évoluer ?

La flotte du CCS se compose de cinq voiliers et d’un yacht à moteur. Tous possèdent des équipements très complets qui permettent un enseignement pratique. Ils peuvent donc être engagés en Méditerranée comme en Atlantique. Par contre, ils peuvent être plus ou moins typés : course, course-croisière ou croisière. Comme certains skippers ont des préférences et s’attachent à un bateau, nous faisons tourner les bateaux d’un plan d’eau à un autre afin qu’ils découvrent d’autres plans d’eau. Plusieurs de nos membres naviguent sur des catamarans, mais il n’y a pas suffisamment d’intérêt pour que le club en fasse l’acquisition et développe ce genre de navigation.

Quelle est votre vision du CCS en 2020 ?

Vers quel avenir navigue notre grand club national ? Comme partout, on constate un désintérêt général pour la vie associative. On est prêt à consommer mais pas à s’engager sur la durée. Le CCS n’y échappe pas. Mais contrairement à d’autres grandes associations, le nombre de membres continue de progresser régulièrement. skippers-ipad-fr-60-149Cela démontre que les navigateurs lacustres sont toujours intéressés à connaître la grande bleue. Ils recherchent des vents plus soutenus que les calmes estivaux de nos lacs et ont envie de découvrir des rivages lointains. En qualité de navigateurs responsables, ils n’y vont pas sans une formation théorique et pratique adéquate. Ils respectent la mer. Avec ses groupes régionaux répartis sur tout le pays, le CCS a des cartes à jouer ; il couvre certes tous les besoins mais il doit se remettre en cause en permanence et adapter son enseignement aux exigences actuelles et aux souhaits de la jeunesse. Notre permis de navigation suisse, reconnu dans le monde entier, doit rester une référence auprès des administrations étrangères et des loueurs. Pas de concession sur la qualité et les exigences, c’est le prix à payer pour une navigation sans soucis.

Quelles synergies verriez-vous entre le CCS et Swiss Sailing ?

Une convention de collaboration avec Swiss Sailing charge le CCS de représenter la Suisse aux conférences de l’European Boating Association et lui donne le droit d’organiser des cours de sécurité reconnus par World Sailing. Les deux parties sont conscientes qu’il y aurait d’autres synergies à développer, mais Swiss Sailing étant une association faîtière et le CCS, un club, une collaboration n’est pas évidente. L’idéal serait que les membres de Swiss Sailing puissent embarquer à leur guise pour des croisières en mer sur nos bateaux selon une formule à trouver.

Quelles évolutions principales avez-vous observé parmi les navigateurs et plaisanciers suisses ces 20 dernières années ?

Au début du CCS, on allait en mer pour gagner sa vie. La mer était réservée aux pêcheurs et à la marine marchande. Il fallait être un plaisancier un peu fou pour apprécier la vie dans un monde penché, humide et inconfortable. Il y a une vingtaine d’années, naviguer à six personnes sur un 36 pieds était courant. En 20 ans, la taille des bateaux a bien évolué. Maintenant, il faut une embarcation de 45 à 50 pieds, des voiles à enrouleur, un accastillage simplifié pour faciliter la navigation. Et si le vent souffle un peu fort, on navigue au moteur. Les vols à prix réduits permettent d’atteindre facilement des bases de location partout dans le monde. C’est une évolution inéluctable mais finalement positive, l’essentiel est bien d’y trouver son plaisir.

Par quelle zone de navigation ne serez-vous jamais lassé ?

Depuis 1991, j’organise et participe chaque année à une croisière-vacances pour le CCS Genève et navigue régulièrement sur des bateaux du club. Ces périples m’ont conduit du cap Nord, aux îles Scilly en passant par la Polynésie, les Antilles, les îles Vierges, les Seychelles, la côte Est américaine, jusqu’en Nouvelle-Ecosse et les pays méditerranéens européens. Dernièrement, j’ai découvert l’archipel des Exumas au départ de Nassau (Bahamas). Mais ma préférence va à la Bretagne : optimiser son parcours en utilisant les courants de marée, arriver au bon moment à l’entrée des ports, slalomer entre les cailloux, ça, c’est la navigation que j’apprécie.

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