Malgré un nombre de Challengers réduit, la Louis Vuitton Cup et 34e America’s Cup vont se dérouler cet été et en septembre dans la baie de San Francisco. La tragédie qui a endeuillé le team Artemis début mai, a fait planer le doute sur le déroulement global de la compétition. Le syndicat de Paul Cayard s’est en effet difficilement remis de son chavirage. Et Luna Rossa a gardé une réserve quant à son engagement, si le règlement n’est pas adapté à la situation.

Les nouvelles mesures de sécurité imposées après le drame de mai se sont par ailleurs avérées très chères à mettre en œuvre. Grant Dalton, dont l’équipe ETNZ dépend d’un budget de sponsors et non d’un milliardaire, ne s’est pas privé de critiquer la situation, relevant qu’il n’avait pas la possibilité « d’appeler le boss » pour obtenir une rallonge.

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Situation économique peu favorable

La situation économique difficile du moment fait évidemment partie des causes du manque de succès de l’épreuve. Le choix du voilier, qui s’est révélé beaucoup plus cher qu’annoncé, et la démesure globale de l’ensemble, sont également responsables de cette quasi-désertion. Russell Coutts a déclaré lui même que les AC 72 sont une erreur, et qu’ils engendrent des coûts beaucoup trop élevés.

Aux USA, la presse annonce que la ville de San Francisco se sent flouée par les organisateurs. Vu le manque de concurrents, l’intérêt porté par le public risque fort d’être limité, et les investissements consentis par la ville ne pourront être rentabilisés.

Russell Coutts et Larry Ellison ne sont donc pas dans une posture idéale pour aborder sereinement l’épreuve. Grant Dalton ou Patrizio Bertelli ne manquent pas une occasion de les critiquer, pointant du doigt le mal qu’ils ont fait à cette compétition. Un regard sur l’histoire de la Coupe nous montre toutefois que cette situation n’est pas exclusive à cette édition. Les conflits de tous niveaux ont toujours fait partie de cette saga depuis 150 ans. Le manque de Challengers reste par contre une première dans l’aventure moderne de la Louis Vuitton Cup.

Programme des courses

Round Robin : du 7 juillet au 4 août
Louis Vuitton Demi-Finale : du 6 au 14 août
Louis Vuitton Finale : du 17 au 30 aout
Red Bull Youth America’s Cup : du 1er au 4 septembre
America’s Cup Finale : du 7 au 21 septembre

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Team Tilt, la touche suisse de la Coupe

Si aucun syndicat suisse n’est présent pour cette America’s Cup, le Team Tilt portera néanmoins nos couleurs pour la Youth America’s Cup qui doit être disputée juste avant l’épreuve reine début septembre. L’équipe, montée par Alex Schneiter, et menée par Lucien Cujean sur l’eau, se profile parmi les meilleures en lice. « Notre force, c’est notre programme d’entraînement qui très est complet, avec du D35, du M2, du Classe A et de l’Extreme 40 », explique Alex Schneiter. Et de poursuivre: « Notre faiblesse, s’il devait y en avoir une, c’est que nos marins n’ont pas encore de palmarès olympique ou mondial. » Cette analyse reste néanmoins toute relative, car la cohésion d’équipe est probablement plus importante.

Au niveau des forces en présence, les Australiens et les Néozélandais représentent les concurrents les plus sérieux du team helvétique. Alex Schneiter reste confiant et très content de l’évolution du projet. « L’équipe doit peut-être encore apprendre à maîtriser sa fougue dans certaines situations. Mais pour le reste, les progrès réalisés depuis le début sont remarquables. Et nous nous réjouissons tous de retourner en AC 45 dès cet été. »

CHALLENGERS

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Artemis Racing

– Royal Swedish Yacht Club
– Président : Torbjörn Törnqvist
– CEO : Paul Cayard
– Designer : Juan Kouyoumdjian
– Cellule arrière : Iain Percy, Nathan Outteridge, Loïck Peyron

Challenger of Record, Artemis Racing était en théorie un candidat sérieux, possédant des moyens qui devaient lui permettre de détrôner Oracle. Au fur et à mesure de l’avancement de son projet et de sa préparation, le team du magnat du pétrole Torbjörn Törnqvist a démontré de nombreuses lacunes. Le drame survenu en mai, avec la disparition d’Andrew Simpson, a mis le syndicat dans une posture encore plus difficile. Et si Paul Cayard est une figure de l’America’s Cup depuis plus de vingt ans, tout porte à croire que ce n’est pas encore cette année que le Californien va remporter la Coupe.

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Luna Rossa Challenge

– Circolo della Vela Sicilia
– Président : Patrizio Bertelli
– Directeur opérationnel : Matteo Plazzi
– Designer : Roberto Biscontini
– Cellule arrière : Francesco Bruni, Massimiliano Sirena, Paul Campbell-James

Luna Rossa Challenge a évolué en étroit partenariat avec ETNZ, et le team s’est basé en Nouvelle-Zélande pour une bonne partie de sa préparation. Unique Challenger à n’avoir construit qu’un seul AC 72, le défi italien ne se positionne pas comme favori. Bertelli reste quoi qu’il en soit un des hommes forts de l’America’s Cup, et n’a manqué aucune occasion de marquer ses désaccords avec le Defender, notamment après l’accident survenu sur Artemis. Homme sans concession, le patron de Prada est resté réservé sur sa participation jusqu’au dernier moment.

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Emirates Team New Zealand

– Royal New Zealand Yacht Squadron
– Directeur : Jim Farmer
– Directeur Général : Grant Dalton
– Designers : Guillaume Verdier/Pete Melvin
– Cellule arrière : Dean Barker, Ray Davies, Adam Beashel

Doubles vainqueurs de l’America’s Cup, les Néozélandais font clairement figure de favoris pour cette campagne. Seul syndicat ne dépendant pas d’un mécène fortuné, ETNZ est essentiellement financé par le sponsoring. Doté d’un budget de fonctionnement suffisant pour entrer en concurrence avec les Américains, le syndicat de Grant Dalton espère bien ramener l’aiguière d’argent dans l’hémisphère sud, et faire de l’America’s Cup une compétition plus ouverte. Dalton a déjà dit qu’il reviendrait au monocoque en cas de victoire.

DEFENDER

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Team Oracle USA

– Golden Gate Yacht Club
– Président : Larry Ellison
– CEO : Russell Coutts
– Designers : Mario Caponnetto/Scott Ferguson/Michel Kermarec
– Cellule arrière : James Spithill, John Kostecki, Darren Bundock.

Après avoir remporté la 33e America’s Cup à Valence contre Alinghi, Team Oracle avait promis une épreuve équitable, et surtout abordable qui devait réunir, en tout cas, une dizaine d’équipes. A part le projet des AC 45, qui s’est révélé être une réussite, le Defender s’est largement fourvoyé. Aujourd’hui, s’il détient en théorie une solide avance technologique sur les Challengers, Oracle pourrait bien se faire prendre à son propre jeu, dépassé par la tournure des choses.