Yes we Cannes!

© Loris von Siebenthal

Spécialiste des bateaux de course depuis près de 20 ans et des multicoques de compétition depuis plus de dix ans, l’architecte naval Sébastien Schmidt applique avec délectation à la croisière les leçons apprises en course. Pour mémoire, on doit à son atelier le Formule 40 Alinghi qui a dominé le Lac Léman de 1999 à 2003, puis les Décision 35 qui ont alors pris le relai, et dans un tout autre registre la saga des Luthi ou des 5.5mJI de Wilke, pour ne citer que quelques exemples. « Lorsque Jürg von Ins est entré en contact avec nous pour travailler sur le premier catamaran de 55 pieds de Swiss Catamaran Concept, j’ai tout de suite été séduit par sa volonté de proposer un voilier à la fois hauturier et confortable, performant et qualitatif », reconnait l’architecte. Le brief de l’entrepreneur suisse allemand basé à Genève, ancien propriétaire d’un Switch 55 dont le chantier avait fait faillite, tenait en quelques lignes : il fallait réaliser un catamaran de voyage, au comportement marin mais pas extrême, confortable mais pas luxueux, en sandwich pour plus de légèreté avec une bonne qualité de construction. L’idée, ensuite, consistait à utiliser le moule des coques pour proposer du semi-custom à d’autres clients insatisfaits sur ce créneau, en personnalisant leur unité.

 

De la course à la croisière
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Du brief à la mise à l’eau, 2000 heures ont été nécessaires au cabinet d’architectes pour aboutir à la première version du 55 pieds. « Notre travail sur le trimaran offshore de 60 pieds Gitana X nous a beaucoup servi, qu’il s’agisse du dégagement des étraves sans martingale qui traîne dans l’eau, des extrémités fines des coques, des renforts en carbone, voire du mât en carbone et de la grand voile à corne qui sont devenus aujourd’hui plus banals. » Cette culture du multicoque de compétition a également servi à Sébastien Schmidt et Damien Cardenoso au moment de concevoir la plateforme, de prévoir des couchettes avec les pieds vers l’avant, ou encore deux postes de barre bien protégés et des winches électriques. Les critères de qualité impliquaient également un accastillage et un gréement haut de gamme et fiables qui tiennent l’océan (Harken, Spinlock, Incidence). Autant de caractéristiques qui permettent de prendre du plaisir à 20 nœuds pendant un convoyage entre Malte et Marmaris, ou de convaincre un client pendant un essai dans la rade de Toulon avec 25 nœuds de mistral bien posé : « Dans cette houle de travers, nous lui avons montré comment utiliser les dérives pour stabiliser le bateau en baissant un peu celle qui était au vent, puis à remonter au près facilement en jouant sur leur allongement », explique ainsi Sébastien Schmidt, qui précise pourtant : « Attention, ce n’est pas un bateau de course, mais notre expérience dans ce domaine le rend plus fiable et confortable en navigation dans les conditions musclées. »

 

Des clients enthousiastes
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A force d’enchaîner les salons nautiques et les essais, le feedback des clients est devenu plus consistant et représentatif d’un large panel européen. D’une manière générale ils apprécient d’une part sa personnalité de bateau de voyage, d’autre part le fait que son prix soit tout compris, et pas « une offre d’appel à laquelle il faut ensuite ajouter l’antifouling, la mise à l’eau, les voiles, la machine à laver, et toutes les options qui au final aboutissent au même montant », indique Jürg von Ins, qui a par ailleurs étoffé son réseau de distribution en Allemagne, en Autriche et en France.

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Naturellement il y a aussi parfois des critiques, qui s’avèrent souvent constructives. « Entre la version quatre cabines et la version propriétaire, nous avons amélioré les espaces de rangement, optimisé la répartition des systèmes, introduit une ventilation mécanique ultra-efficace qui permet de renouveler l’air même quand toutes les écoutilles sont fermées (par exemple en naviguant dans le froid nordique ou en mouillant sous une averse) », décrit l’architecte. Swiss Catamaran Concept s’est aussi vu réclamer une version de 45 pieds pour des couples seuls, où la clientèle nordique dont les normes portuaires et d’assurances fixent des limitations à 15 m de long et 7,50 m de large. La même philosophie du sur-mesure partiel prévaut alors, permettant au client de personnaliser les finitions et à Sébastien Schmidt de mettre en pratique ses études d’architecte d’intérieur. Ce sera d’autant plus vrai si les deux demandes pour des versions de 75 pieds aboutissent, émanant de clients allemands et français. « Il s’agirait alors d’un énorme projet pour lequel nous travaillerions en réseau », songe Sébastien Schmidt. La plus grande satisfaction de Jürg von Ins reste la présentation de la 2e version du Swiss Catamaran 55 l’an passé à Cannes, que « les visiteurs ont trouvé magnifique ». Après de nouveaux essais au printemps et cet été aux Baléares (au nord de Majorca, à Sóller, où les reportages photos et vidéo ont été réalisés), le catamaran aux couleurs helvétiques sera exposé pour la troisième fois au Festival International de la Plaisance de Cannes. Ses cousins lémaniques, les D35, régateront alors pour la première fois juste à côté, dans le cadre des étapes méditerranéennes du Vulcain Trophy.

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