Beaucoup craignent les requins… mais saviez-vous que, sans eux, tout l’écosystème océanique serait en danger et, par extension, notre vie terrestre? Cela peut paraître quelque peu alarmiste, mais c’est une réalité pour laquelle se bat la fondation Save our Seas depuis sa création il y a 20 ans. Le siège de la fondation étant à Genève, nous vous la présentons dans le cadre de son jubilé.

Texte : Pauline Katz

Depuis 2003, Save Our Seas Foundation (SOSF) se consacre à la protection de la vie marine, en particulier des élasmobranches. Ce nom ne vous est pas familier ? Il s’agit de poissons cartilagineux sans réelles arêtes ou dit plus simplement : des requins et des raies. La fondation a déjà soutenu près de 500 projets dans plus de 90 pays. Elle diffuse ses passionnantes découvertes à grande échelle sur ses réseaux sociaux et dans ses centres des Seychelles, d’Afrique du Sud et de Floride. Elle y accueille chaque année des milliers d’étudiants avec une vision précise qu’évoque son CEO James Lea : «Nous transmettons nos connaissances et notre passion pour l’océan en espérant une prise de conscience collective et une meilleure protection à l’avenir.»

Que serions-nous sans eux?

Si la fondation se bat corps et âme pour la protection et la reproduction des élasmobranches, ce n’est pas uniquement par passion, mais aussi car ils nous rendent bien des services. Savez-vous pourquoi les raies et les requins sont si importants au bon fonctionnement de notre planète? Voici certains des services vitaux qu’ils nous rendent. Au sommet de la chaîne alimentaire, les requins agissent tout d’abord comme régulateurs. Ils se nourrissent d’autres espèces carnivores et, en limitant leur prolifération, permettent aux herbivores d’assouvir leur rôle de « défrichage» du récif corallien. Sans eux, les coraux et leur rôle clé dans l’équilibre océano-terrestre disparaîtraient. Par ailleurs, les requins patrouillent dans les herbiers marins et empêchent ainsi le surpâturage. Ils protègent de ce fait le poumon vert des mers, lequel joue un rôle essentiel dans la lutte contre le réchauffement climatique en capturant près de 35 fois plus de carbone que les forêts tropicales humides. Les raies, elles aussi, sont indispensables au bon équilibre marin. En creusant les fonds marins à la recherche de nourriture, elles créent des micro-habitats pour de nombreuses espèces. La liste est encore longue mais concluons avec les phytoplanctons, organismes essentiels à notre survie car ils produisent la moitié de l’oxygène terrestre. Les élasmobranches sont leurs fournisseurs officiels de nourriture depuis les profondeurs.

Menacés au quotidien

Une combinaison de facteurs malheureux a causé le déclin de près de 70% des élasmobranches au cours des cinquante dernières années et menace aujourd’hui leur survie. Les requins sont tout d’abord tributaires d’un système reproductif très lent avec une maturité sexuelle tardive et des gestations pouvant durer jusqu’à deux ans. Ajoutez à cela la surpêche, notamment pour le commerce des ailerons, et vous obtenez une combinaison explosive qui engendre de nombreuses disparitions avant même d’être en âge de procréer. À cela, il s’agit encore d’ajouter les facteurs indirects du changement climatique et de la perte d’habitat qui contraignent encore plus leur survie. Les raies reposent sur le même schéma malheureux.

L’ÎLE DARWIN, SITUÉE DANS L’ARCHIPEL DES GALAPAGOS, EST L’UNE DES PLUS GRANDES RÉSERVES DE REQUINS AU MONDE.

Apprendre pour mieux protéger

James Lea, CEO de la fondation et, bien entendu, biologiste passionné par la vie marine, nous parle de la diversité des sujets traités par la fondation: « Nous soutenons des projets de recherche, d’éducation et de conservation. Souvent, ces trois axes s’imbriquent. Dans notre centre des Seychelles par exemple, nous menons des recherches, mais accueillons aussi de nombreux étudiants pour transmettre nos connaissances et notre passion. Les résultats de nos recherches permettent de mettre en place des projets ciblés de conservation comme des zones de protection pour les nurseries.»

Mille et une découvertes

Comme son CEO l’affirme : «Seules de bonnes connaissances scientifiques permettent de comprendre les besoins et définir des stratégies efficaces de conservation. » Les projets de recherche sont donc la base de travail de la fondation. Passons-en certains en revue ! Une recherche sur l’ADN des requins a permis de traquer la contrebande de leurs ailerons, une autre de mieux comprendre les effets du changement climatique sur leur reproduction. Le mystérieux système reproductif des raies a pu être étudié grâce à des ultrasons submersibles et sans contact. La concurrence interespèce a pu être analysée dans des pouponnières. Les réseaux sociaux et le site internet de la fondation Jonathan R Green Dillys Pouponeau/SOSF sont par ailleurs bourrés d’informations passionnantes. Saviez-vous par exemple que les requins baleines filtrent jusqu’à 600’000 m3 d’eau par heure pour s’alimenter, que les oursins ont des milliers de pieds ou encore que les crevettes-mantes ont les yeux si développés qu’elles peuvent voir des couleurs indétectables par l’œil humain?

MOINS CONNUES QUE LES REQUINS, LES RAIES JOUENT ÉGALEMENT UN RÔLE INDISPENSABLE DANS L’ÉCOSYSTÈME MARIN.

20 ans, ça se fête!

Si vous vous êtes baladés sur les quais du Mont-Blanc cet été, votre œil aura certainement été attiré par les magnifiques images réalisées par Thomas Peschak, photographe pour le National Geographic. Organisée dans le cadre du jubilé de la fondation, l’exposition souhaitait illustrer la beauté, mais aussi la fragilité du monde marin. Et pour terminer ce jubilé en beauté, la fondation organise une soirée le samedi 23 septembre au théâtre du Léman. Avez-vous aussi été captivé par le documentaire La sagesse de la pieuvre sorti en 2020? Son protagoniste Craig Forster sera l’invité phare de la soirée. Le documentaire de la réalisatrice Pippa Ehrlich, Older Than Trees, sera projeté et de nombreuses interventions rythmeront la soirée. Ne ratez pas cette occasion de plonger dans le monde passionnant des requins et des raies !