« C’est un baptême du feu difficile. On a gagné une manche le premier jour. C’est huit manches quotidiennes, alors à la fin de la journée, on est un peu explosé. Lors des toutes premières régates, il y avait du vent fort, des vagues, c’était des conditions assez physiques. » Jérôme Clerc est un peu mitigé à l’issue de cette prise de contact en Extreme 40 : « C’est l’intensité des runs qui rend le truc très éprouvant. Cet hiver, on s’est bien préparé. On savait qu’en venant là, on passait à un niveau supérieur. » Le jeune équipage genevois a dû batailler ferme pour tenir le coup face aux pointures en lice. Manquant parfois de rapidité dans les manœuvres et de fluidité aux passages de bouées, Jérôme Clerc reconnaît qu’il y aura encore du boulot pour quitter le rang de lanterne rouge. Néanmoins, Realteam a de grandes ambitions pour 2013. Outre défendre le titre gagné la saison dernière en D35 sur le Léman, Clerc veut obtenir de bons résultats sur le circuit des Extreme Sailing Series. Il ne cache pas sa joie d’y être engagé : « On est vraiment très fier d’avoir un nouveau bateau suisse sur ce circuit mondial qui est presque l’antichambre de la coupe de l’America. Toutes les grosses écuries sont là. Esteban Garcia, le président de Realstone et fondateur de Realteam, soutient notre projet depuis deux ans. Il a aussi croché en disant : victorieux en Décision 35. Quel est le prochain défi ? Voilà comment on s’est retrouvés là. » Connaissant la qualité du jeune équipage, on est en droit d’imaginer une belle progression en Extreme 40. Mais au fond, les deux types de multicoque sont-ils vraiment distincts ? « C’est très différent ! Le D35 est un bateau fin, puissant, technique, tandis que l’Extreme 40 est hyper combatif, mais un peu lourd, pas très fin. Entre nous, on l’appelle un camion. On ne cherche pas la finesse des nœuds ! Comme dans le match race, il faut trouver le positionnement du bateau. Manœuvres et positionnement, c’est deux régates différentes. Et c’est une grande chance de pouvoir faire les deux. » N’est-ce pas plus excitant, dangereux et spectaculaire que le D35 ? Jérôme Clerc est lucide: « Je n’ai pas une énorme expérience sur ce type de multi, donc j’ai un peu de peine à répondre. Le premier jour, ce n’était en tout cas pas de la cascade, mais de la vraie régate. Bien sûr, c’est chaud, parce que les parcours sont plus courts, les bateaux restent souvent collés ensemble. A un moment donné, il faut quand même gérer un peu le risque. C’est évidemment beaucoup plus dur que le D35. En soi, l’Extreme 40 n’est pas forcément plus physique, mais exige davantage de manœuvres ».

Entre soleil et thermiques, la première des huit étapes de la compétition des Extreme 40 a été passionnante jusqu‘à un final à couper le souffle. © Jean-Guy Python
Podium pour Alinghi
Realteam et Alinghi, deux bateaux aux couleurs suisses dans le circuit mondial des Extreme Sailing Series. © Jean-Guy Python

Lors de cette étape omanaise, Ernesto Bertarelli a dû, lui aussi, faire preuve de combativité pour se maintenir à la troisième place du classement final. Dans le stade nautique de Muscat, l’équipage d’Alinghi a souvent été meilleur dans des vents faiblissants. Particulièrement le mercredi, en remportant trois manches sur les six courues. « En Extreme 40, il y a beaucoup de bagarre, c’est très serré, on est toujours au contact », explique-t-il. En raison de thermiques qui avaient tendance à s’essouffler, les bateaux n’ont pas atteint des vitesses exceptionnelles et le spectacle des confrontations était plutôt timide.

Favori de ce premier rendez-vous, The Wave, Muscat termine en tête de l‘étape d‘Oman. Realteam, lanterne rouge, a encore besoin d‘un peu de temps pour trouver ses marques. © Jean-Guy Python

Malgré cela, la tension était bien palpable sur le plan d’eau. Alinghi a fait preuve d’une grande régularité tout au long de cette rencontre au Sultanat d’Oman. Mission accomplie, donc, pour l’équipage helvétique, avec Ernesto Bertarelli à la barre et Morgan Larson – ancien skipper d’Oman Air – à la tactique. L’équipier Pierre-Yves Jorand a le sourire : « Ernesto, Yves, Nils et moi avons bien sûr l’habitude de naviguer ensemble. Nous sommes très à l’aise dans ces conditions de petit temps. Morgan a fait de bons choix tactiques et nous sommes très satisfaits de notre troisième place. » C’est le local de l’étape, The Wave, Muscat, barré par le britannique Leigh McMillan, qui remporte cette première épreuve des Extreme 40. Il a vécu un final de rêve en réussissant à combler 15 points de retard sur le leader Red Bull Sailing Team et finalement s’imposer à domicile dans un finish à couper le souffle.

Baptême du feu pour Jérôme Clerc et son équipage qui se sont bien battus en péninsule arabique. © Jean-Guy Python
Huit catamarans pour huit étapes

Les huit étapes 2013 promettront de belles bagarres sous des cieux aussi divers que Singapour, Qingdao, Istanbul, Porto, Cardiff, Nice et Rio de Janeiro. Au sein des équipages, dix nationalités sont représentées. Les navigateurs participants cumulent dix-huit campagnes olympiques, trente campagnes pour l’America’s Cup, trente trois victoires en championnat du monde et six médailles olympiques.

Une nouvelle fois favori, The Wave, Muscat va trouver Red Bull Sailing Team sur son chemin. Ces deux leaders vont se livrer à des duels épiques avec pour arbitre probable Alinghi. A l’issue de cette étape omanaise, Ernesto Bertarelli a vite démontré la somme de ses ambitions en visant d’emblée une place sur le podium.

Troisième place pour Alinghi. Ernesto Bertarelli et Pierre-Yves Jorand, très à l‘aise au large de Muscat. © Jean-Guy Python